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La main coupée (Отрезанная рука)
  • Текст добавлен: 15 октября 2016, 00:30

Текст книги "La main coupée (Отрезанная рука)"


Автор книги: Марсель Аллен


Соавторы: Пьер Сувестр
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M. de Vaugreland, qui le suivait de loin, eut un léger soupir de satisfaction, car il aperçut alors Juve dissimulé dans l’encoignure d’une fenêtre. À côté de lui se trouvait Fandor. Un peu derrière ceux-ci, se tenaient Pérouzin et Nalorgne, affectant des airs indifférents, mais prêts à s’abattre sur l’officier si celui-ci faisait un mouvement.

Était-ce l’instant décisif ? Ivan Ivanovitch venait de regarder sa montre.

Il se dirigea la tête basse vers l’escalier qui conduisait aux bureaux de l’administration. Comptait-il se rendre chez le directeur, qu’il n’avait pas remarqué dans la salle et croyait sans doute à son cabinet ? Si telle était l’intention de l’officier russe on pouvait espérer qu’une explication interviendrait. Depuis plus d’une heure déjà qu’il était au Casino, rien d’anormal ne s’était produit, peut-être avait-il décidé de surseoir au bombardement, peut-être n’était-ce qu’une menace ?

Mais alors qu’il émettait cette pensée optimiste – car on croit aisément ce que l’on désire – M. de Vaugreland dut changer brusquement d’opinion.

Il recula d’un bond, étouffa un cri de terreur, s’appuya le long d’un mur pour ne point défaillir, ses jambes molles ne le portaient plus.

Ivan Ivanovitch, soudain, venait de rebrousser chemin.

L’officier s’était précipité vers une fenêtre ouverte et regardait au dehors. Cette fenêtre, par-dessus les jardins donnait sur la mer et à ce moment précis, Juve, Fandor, les inspecteurs, le directeur du Casino, dont les regards, machinalement, avaient suivi celui de l’officier, voyaient au large un spectacle extraordinaire.

L’imposante et lourde masse que faisait sur les flots la silhouette du Skobeleff avait grossi, se rapprochant de terre. Les feux du navire étaient allumés, les lumières fusaient à travers les sabords et une grosse fumée noire s’échappait des cheminées.

Qu’allait-il se passer ?

Hélas, si le Skobeleff avait désormais reçu l’ordre de bombarder le Casino, nulle puissance au monde ne pourrait l’arrêter.

Une abjecte terreur s’était emparée du directeur. Déjà il voyait le pittoresque immeuble dont il avait la haute direction, chanceler, s’écrouler. Ses ruines fumantes, ensevelissaient sous les décombres la foule des malheureux qui entouraient les tables de jeu ou allaient et venaient dans les galeries, dans l’Atrium, flirtant, plaisantant, gais, insouciants, tout à la joie de vivre. Mais le plus surpris de tous, c’était – en apparence du moins – Ivan Ivanovitch.

L’officier, tout d’abord interdit, avait ensuite levé les bras au ciel, dans un geste d’affolement.

Puis, ne pouvant plus se contenir, cessant de dissimuler, il se précipita, enjambait la fenêtre, sauta dans le jardin.

Les inspecteurs s’élancèrent sur ses talons.

Il n’y avait pas à en douter, c’était assurément le signal, c’était l’heure précise où le drame devait commencer.

– Ah, jura Pérouzin, tu n’échapperas pas et si nous y passons, tu y passeras le premier.

L’ex-notaire n’avait pas achevé, qu’un coup de revolver retentissait.

Juve, à bout portant, venait, en effet, de tirer sur Ivan Ivanovitch.

Mais le policier s’arrêta, interdit, stupéfait…

Il avait tiré en pleine poitrine et Ivan Ivanovitch courait encore.

Juve n’avait pas le temps de se demander longtemps qu’elle était la cause de cette invulnérabilité ? Elle n’était d’ailleurs qu’apparente. Une seconde après retentissait un second coup de feu, puis un troisième.

C’étaient les inspecteurs du Casino qui avaient tiré et, cette fois, l’officier russe, s’arrêta brusquement, chancela une seconde, puis tomba sur le sol, perdant son sang de toutes parts. Le malheureux se roulait dans la poussière, en proie à des souffrances épouvantables. Il n’avait pas été tué sur le coup.

Juve se précipita vers lui :

– Ivan Ivanovitch, qu’avez-vous fait ? qu’alliez-vous faire ? interrogea-t-il vos ordres sont-ils donnés ? répondez avant de mourir. Le Skobeleff doit-il bombarder le Casino ?

Mais le moribond ne semblait rien comprendre à l’interrogatoire de Juve.

Sur son visage déjà blême, s’appliquait le masque de la mort. Cependant qu’il vomissait son sang, il articula d’une voix imperceptible :

– Ah, c’est l’expiation, je meurs, j’expie.

– Juve, hurla une voix, à la fois tonitruante et terrifiée.

C’était Fandor qui appelait le policier :

– Juve, regardez, c’est effroyable, c’est fou. Ah, regardez, Ivan Ivanovitch est mort et pourtant Ivan Ivanovitch se sauve. Oui, nous avions raison l’un et l’autre, ils étaient deux, ils sont deux.

Juve, sans souci du moribond qui exhalait ses derniers râles, se précipita au côté de Fandor.

Le journaliste était monté sur un banc, du haut duquel on découvrait un superbe panorama sur la mer.

Or, voici que dans le pinceau lumineux qu’envoyait le phare sur le Skobeleff afin de comprendre les mouvements qu’effectuait le grand cuirassé, venait de se silhouetter une baleinière menée par six marins qui ramaient vigoureusement. Debout à l’arrière de la baleinière, à la place du commandement, se trouvait Ivan Ivanovitch… un autre Ivan Ivanovitch.

Et celui-là était revêtu d’un uniforme, il allait rejoindre le navire.

Qu’allait-il se passer à bord ?

***

Pendant que se déroulait cet épisode qui apprenait enfin au policier et au journaliste qu’il y avait deux Ivan Ivanovitch, solution, hélas, connue trop tard, solution qui faisait que l’un d’eux, probablement l’innocent, gisait désormais, raidi par la mort. Juve, machinalement, examinait son revolver et se demandait pourquoi sa balle n’avait pas atteint l’infortuné officier russe lorsque, le premier, il avait visé sa poitrine.

Or, Juve s’apercevait qu’à part une cartouche désormais brûlée et dont la balle évidemment avait été retirée, le barillet de son arme était vide.

Non. Il contenait une feuille de papier, où il lut ces mots :

« La fille de Fantômas vous épargne un crime et fait son devoir en sauvant son père. »

– Fandor, s’écria Juve, lis ça.

Le journaliste s’approcha :

– La fille de Fantômas, déclara-t-il, sauve son père, parbleu, Juve, l’officier qui désormais se rend à bord du Skobeleff n’est assurément personne d’autre que Fantômas.

M. de Vaugreland se rapprochait du petit groupe que formaient Juve et le journaliste.

Il venait de faire un large détour pour ne point approcher le cadavre de l’infortuné officier que, d’ailleurs, les hommes de service accouraient enlever, les uns portant une civière, les autres un râteau et du sable fin, afin que l’on pût, immédiatement, faire disparaître des allées du parc, les flaques de sang qui s’y coagulaient.

M. de Vaugreland, tout tremblant, se rapprocha de Juve :

– Nous sommes sauvés, dit-il, grâce à votre perspicacité, monsieur Juve, le malfaiteur n’est plus en état de nuire et je me félicite à l’idée que le scandale sera vite étouffé.

Juve, tout d’abord interdit, regarda le directeur.

Il y eut un silence, puis, brusquement, incapable de contenir sa fureur, le policier empoignait M. de Vaugreland par les épaules, et, brutalement, il lâcha :

– Mais, espèce d’imbécile, vous n’avez donc rien compris ? c’est-à-dire que nous sommes foutus, au contraire, si dans cinq minutes, une salve d’obus ne vient pas ravager votre boutique, c’est que je ne reconnais plus mon Fantômas. C’est un innocent que vos hommes ont tué et c’est le coupable qui, désormais, monte à bord du Skobeleff. Ah, nous sommes frais, et je dois reconnaître que nous avons fait là du joli travail.

– Monsieur, supplia M. de Vaugreland, absolument abasourdi et terrifié à l’idée que des groupes se formaient dans le jardin, que la foule attirée par les coups de revolver et dont la curiosité s’excitait du mouvement du Skobeleff, grossissait de plus en plus, allons-nous-en d’ici.

M. de Vaugreland, prêt à défaillir, eut à peine la force de solliciter de Juve qu’il vint avec lui dans son cabinet.

Quelques secondes plus tord, Juve, Fandor et M. de Vaugreland étaient installés dans le bureau directorial.

Par la fenêtre ouverte on voyait nettement le Skobeleff évoluer sur la rade sans que l’on puisse comprendre ce que signifiait sa manœuvre.

– Aucun doute, avait dit Juve, le Skobeleff cherche la meilleure position pour bombarder le Casino.

Le policier, d’ailleurs, depuis quelques instants, examinait minutieusement la lettre que lui avait confiée M. de Vaugreland :

– Parbleu, s’écria-t-il soudain, après avoir humecté l’écriture et constaté que celle-ci était étonnamment sèche, parbleu, cette lettre ne date pas d’hier. Elle a été écrite il y a dix jours, quinze, peut-être. C’est curieux. Comment se peut-il…

Soudain, M. de Vaugreland l’interrompit :

– Juve, fit-il, je me souviens d’une scène étrange. Tenez, au moment de l’assassinat du malheureux Norbert du Rand. Ivan Ivanovitch est venu me proposer de me rendre les trois cent mille francs que le Casino lui avait, disait-il, prêtés le matin même :

« Qui lui avait prêté cet argent ?

« Nous ne pouvions pas croire qu’un semblable prêt avait été effectué. Personne d’entre nous n’avait en effet reçu la visite d’Ivan Ivanovitch.

– Pourquoi me rappelez-vous tout cela ? interrogea Juve.

– Je ne sais pas, fit M. de Vaugreland, c’est simplement la coïncidence des deux sommes qui attire mon attention.

– Monsieur le Directeur, déclara Juve, vous m’ouvrez des horizons.

Il semblait réfléchir profondément, un silence angoissant régna dans la pièce, que nul n’osait troubler.

– Fandor, s’écria Juve, écoute : La lettre que voici remonte à trois semaines… Elle a été écrite sûrement par Ivan Ivanovitch, car il y a trois semaines le malheureux avait dilapidé au jeu des sommes formidables. Affolé, perdant la tête, il est venu au Casino, il a sollicité, demandé de l’argent, menacé de bombarder la ville si on ne le remboursait pas. Et il a été reçu par un directeur – ou tout au moins par quelqu’un qui s’est donné pour tel. Quelqu’un qui avait trois cent mille francs sur lui et qui a pu les lui remettre. Ce quelqu’un – n’en doute pas, Fandor – c’était Fantômas. Fantômas a gardé la lettre, cette lettre que naïvement Ivan Ivanovitch espérait rattraper le fameux soir où, ayant fait gagner Norbert du Rand et ayant partagé avec lui un gain important, il se proposait de restituer au Casino, en échange du document compromettant, la somme que lui avait prêtée, le matin même, qui tu sais.

« Dès lors, poursuivit Juve, Ivanovitch était dans les mains du bandit. Obligé de lui obéir, contraint à exécuter ses ordres, agissant comme une machine, toujours sous la crainte de voir cette lettre remise aux autorités et d’être châtié de son inconséquence. Certes, Fantômas a récompensé Ivan Ivanovitch en lui faisant gagner de l’argent. Rappelle-toi le truquage du numéro sept de la roulette, mais rappelle-toi aussi, Fandor, que chaque fois qu’un crime se produisait, la responsabilité semblait devoir en retomber sur le malheureux officier.

– Souvenez-vous, Juve, s’écria Fandor qui comprenait à merveille l’explication du policier, souvenez-vous de l’émotion du vrai Ivan Ivanovitch, le fameux soir où je l’ai empêché de regagner son bord. Il prétendait avoir « des ordres » dont il ne pouvait citer l’origine, pour rentrer immédiatement sur son navire.

– C’étaient des ordres de Fantômas, déclara Juve qui ajouta :

« Souviens-toi, Fandor, que perpétuellement l’un et l’autre nous étions en présence, soit du vrai Ivan Ivanovitch, soit de Fantômas qui avait pris sa silhouette, son visage et son apparence pour perpétrer les plus atroces forfaits.

– Souvenez-vous, Juve, poursuivit Fandor, que Fantômas a failli nous brouiller, pour nous avoir trop bien persuadés qu’Ivan Ivanovitch était le coupable.

Juve et Fandor, sans souci du directeur, se prenaient les mains, se les serraient à les broyer.

M. de Vaugreland, abasourdi, considérait, stupéfait, les deux hommes, qui subjugués par l’intérêt réciproque de leurs explications ne se préoccupaient plus de lui en aucune façon.

Soudain la sonnerie du téléphone retentit. M. de Vaugreland, machinalement, bondit à l’appareil :

– Allô ? allô ? Qu’est-ce que vous dites ? Je ne comprends pas. Tenez, je suis trop fatigué, trop ému.

Le malheureux passa le récepteur à Juve qui, se contentant de répondre par brefs monosyllabes, transcrivit, sur une feuille de papier, l’information qu’on lui adressait.

Et Fandor qui regardait par-dessus son épaule lut cette simple nouvelle transmise par le sémaphore :

« Le Skobeleff quitte la rade avec des ordres réguliers de son gouvernement. »

Fandor bondit à la fenêtre.

Assurément l’information était exacte.

Pendant les quelques secondes que le journaliste et le policier s’étaient entretenus, le majestueux cuirassé avait fait volte-face et désormais, en effet, toutes lumières éteintes, sauf les feux réglementaires, il pointait vers la haute mer…

– Dieu soit loué, non seulement nous voici débarrassés d’Ivan Ivanovitch, mais encore cette menaçante forteresse flottante sera hors de vue lorsque se lèvera le jour. Je suis fort heureux d’apprendre que le Skobeleff s’en va. Espérons que nous allons être tranquilles, dit M. de Vaugreland.

– Hum, fit Juve, avec un sourire d’amertume, tranquilles ? c’est peu probable. Sans doute Ivan Ivanovitch est mort mais c’est un innocent que l’on a tué. Sans doute le Skobeleff gagne la haute mer… mais le cuirassé russe a pour chef suprême, à son bord, le plus redoutable capitaine qui soit au monde. Car le Skobeleff est désormais commandé par qui ? par Fantômas.

FIN


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