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Oms en série
  • Текст добавлен: 17 сентября 2016, 23:17

Текст книги "Oms en série"


Автор книги: Stefan Wul



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2

Sur la côte du continent A, un petit port abandonné depuis longtemps par les draags hébergeait dans ses sous-sols une étrange cité.

Dans un réseau de canalisations souterraines et d’anciens égouts, une ville cachée avait installé ses rues, ses unités d’habitation et ses bâtiments publics. Une ville d’oms. De trois millions d’oms!

Une activité fiévreuse y régnait. Sans arrêt, de petites unités de commando se présentaient à ses portes, ramenant de chez les draags une foule de paquets hétéroclites: boîtes d’aliments, ferraille, outils, écouteurs d’instruction. On déposait tout cela en vrac et, tandis que chaque chef d’unité faisait son rapport et signalait ses pertes, d’autres oms classaient le butin, faisaient rouler les boîtes sur la pente de certains couloirs, transportaient avec précaution les écouteurs vers les centres d’étude.

Au centre de la ville, un ancien collecteur avait été cloisonné en chambres de travail pour abriter les services officiels. Dans l’une de ces chambres, un grand om à barbe blonde considérait d’un air sévère les graphiques ornant les murs. Il désigna l’un d’eux.

– Les stocks d’aliments augmentent encore, dit-il. Vingt mille poids! J’ai déjà signifié ma volonté de stopper les arrivées. C’est du temps et de l’énergie perdus. Nous avons là de quoi tenir un an après l’exode!

– Ne te fâche pas, Terr, dit un Noir d’âge mûr assis en face de lui. Tes ordres n’ont pas eu le temps d’arriver partout. Les unités ne sont pas toutes munies de téléboîtes.

– J’avais pourtant dit…

– Je sais. Vaillant fait ce qu’il peut, mais l’usine en question se trouve à cent cinquante stades d’ici. Pour l’atteindre, il faut progresser sur deux stades en terrain découvert, et comme la région n’est desservie par aucun pont roulant, nous avons bien des difficultés à obtenir le matériel. J’ai affecté la moitié des monteurs de télé aux ateliers E, pour qu’ils ne restent pas inoccupés.

Terr inscrivit quelque chose dans un carnet. Puis il en tourna plusieurs feuillets, sourcils froncés.

– Pas trop de pertes, hier?

– La moyenne. Toujours pas de nouvelles de l’opération Klud?

– Pourvu qu’ils réussissent! Sans ces pièces, nous ne pourrons jamais partir. Les trois machines ne seront que d’inutiles tas de ferraille.

– Fais confiance à Vaillant. Il a mis ses meilleurs oms dans le coup.

Une lampe clignota sur une boîte cubique. Terr enfonça un bouton:

– Oui?

– Ici Vaill, dit une voix.

Terr et Charbon se sourirent.

– Eh bien? dit Terr.

– Les pièces arrivent, Terr. J’en touche une du doigt pendant que je parle. Les deux autres sont en route, quelque part du côté de la Sente 4. Pratiquement, nous les avons.

– Bravo, exulta Terr. Fais vite porter la première aux ateliers!

– Par la glissière, elle y sera dans quelques minutes.

– Sans casse, j’espère.

– Mes gars sont en train de la matelasser. Ne t’inquiète pas.

Terr donna une bourrade de satisfaction dans les côtes de Charbon. Il rangea son carnet dans la poche de sa tunique et dit:

– Premiers essais en bassin dans trois jours, vieux Charb! Il faut que j’aille voir ça!

Charb lui mit la main sur l’épaule.

– Méfie-toi, petit. Tu te surmènes. Tu dors à peine, tu manges à toute vitesse et…

– Je ne me suis jamais senti aussi bien.

À cet instant, un remue-ménage filtra de la pièce voisine. Quelqu’un heurta la porte.

– Oui!

Un om au visage ridé apparut.

– Terr, dit-il, la Vieille est mal. Elle te demande.

Terr et Charb se jetèrent un regard éloquent. Ils quittèrent la chambre sans un mot et se rendirent dans un couloir de circulation. Terr enfonça le bouton de priorité et attendit une minute, tandis que des lampes rouges s’allumaient dans le lointain à tous les carrefours. Puis il enjamba la selle du chariot. Charb se plaça derrière lui.

Ils roulèrent sur la pente, de plus en plus vite. Au neuvième millistade, Terr freina et, bloquant le véhicule sur la crémaillère d’ascension, se précipita dans un couloir adjacent. Après avoir salué au passage plusieurs notoriétés de la cité, il entra chez la Vieille.

Celle-ci était allongée sur un matelas de confort. Une couverture cachait ses jambes. Elle fit un faible signe de la main.

– Laissez-moi… seule avec lui, souffla-t-elle.

Charb mit un doigt sur ses lèvres et entraîna doucement les deux médecins dehors.

Terr s’agenouilla au chevet de la vieille ome noire. Il lui prit les mains et les trouva glacées. Une odeur de pharmacie flottait autour d’elle.

– Petit, dit-elle, j’verrai pas l’Exode.

– Ne parle pas, souffla Terr, tu te fatigues.

Elle eut un petit rire cassé. Une toux secoua ses épaules pointues sous la tunique. Elle désigna du doigt un flacon sur une table. Terr lui fit boire quelques gouttes et lui remonta un peu la tête. Elle s’apaisa bientôt.

– Écoute… je voulais te voir avant… de m’en aller. Si… si! J’ai pas peur, tu sais! Je voulais te dire que… que je t’aime bien, petit. Faut pas faire une tête comme ça. Regarde, moi, je rigole… On s’en va tous. Un jour, ça sera ton tour, dans longtemps, j’espère.

Elle branla la tête.

– C’est pas bien malin, ce que je dis là. Je suis qu’une vieille sotte. Vous tous, avec… les écouteurs des draags, vous êtes plus intelligents que moi. Même les petits… les tout petits oms qui savent lire les paroles draags, maintenant. C’est grâce à toi, ça. Pour l’intelligence, tu es un peu là. Mais… au début, quand tu étais encore un petit, tout ce qu’on a fait, c’est grâce à moi. Parce que j’étais… énergique, pas vrai?

Terr l’approuva de la tête. Elle serrait son vieux poing nerveux sur la couverture.

– Moi l’énergie, toi… (elle lui frappa lentement le front du doigt)… la tête. Alors, je voulais te dire… Avec ta tête, si je te donne mon énergie, tu réussiras l’Exode. Faut les deux. Je sais bien que tu en as, de l’énergie, mais je te donne la mienne en plus. Tout à l’heure, je serai plus là. C’est toi qui vas tout commander… D’ailleurs, depuis des jours, tu commandes déjà. Les autres t’écoutent, pas vrai?

Elle haleta un moment sans rien dire, puis ses mains emprisonnèrent celles de Terr, comme des serres.

– Tu sens? Tu sens, petit? Mon énergie qui coule de mes bras? Elle va dans les tiens. Je te la donne. Elle me quitte. Tu sens? Tu…

Sa tête pesa plus lourd sur l’étoffe. Ses lèvres violettes restèrent figées dans un sourire.

– Vieille? dit Terr.

Il dégagea doucement ses mains tièdes des doigts froids de la morte. Il lui ferma les yeux, resta un moment penché sur elle. Puis il se dirigea d’un pas lent vers la porte.

Tout le monde était debout dans la pièce voisine. Terr leur fit signe que c’était fini. Sans regarder derrière lui, il sortit, suivi de Charb dont les grosses lèvres tremblaient d’émotion.

Dans le grand couloir, une foule s’était agglutinée, prévenue par des rumeurs imprécises. Tous regardaient Terr, apparu en haut des marches.

– La Vieille est morte, annonça-t-il d’une voix sans timbre.

La stupeur figea la foule. Depuis toujours, la Vieille était le symbole de leur unité, de leurs espérances, de leur destin. Mais quand Terr fit mine de descendre, une voix d’ome lança:

– Vive l’Édile!

Cela déclencha une explosion de vivats.

– Terr! Notre Édile! Vive l’Édile des Oms! Vive l’Exode!

Sans succès d’abord, Terr leva la main pour endiguer le tumulte. Un tic nerveux fit trembler son menton, sous sa barbe blonde.

Quelqu’un sortit de la résidence de la Vieille et joua des coudes pour se placer tout près du nouvel édile et lui présenter une téléboîte. À la vue du petit appareil, la foule s’apaisa par degrés.

– Oms libres, dit Terr, la Vieille est morte en m’adjurant de réussir l’Exode. Depuis des jours et des jours, elle a lutté pour nous. Puis elle a lutté contre la mort.

Plus qu’à la foule présente, il sentait sa voix s’adresser par les ondes à des milliers d’oms penchés sur leurs récepteurs dans toute la ville, et plus loin, aux sentinelles des postes avancés jalonnant les pistes. Plus loin encore, peut-être, son discours allait réveiller l’énergie des unités de pillage en action dans les villes draags.

Quelque part, aux environs de Klud, un enfant draag s’amusait à enregistrer les parasites d’une téléboîte. Par jeu, il les faisait repasser dans un plurigraphe. Il s’avisa soudain que certains bruits ressemblaient à des paroles. Des mots draags, comme prononcés à toute vitesse et déformés par un gosier animal, sonnèrent à ses tympans.

Surpris et curieux, l’enfant draag recula le fil du plurigraphe et repassa plus lentement les sons étranges: «Oms libres, nasilla l’appareil, la Vieille est morte…»

Le reste se perdit dans un orage de crépitements. Par instant, on captait cependant des mots isolés: «lutté… exode… oms…»

L’enfant draag se dressa, ravi et faisant claquer ses membranes.

– Père, cria-t-il. Il y a des oms qui parlent dans le plurigraphe!

– Je t’ai défendu de jouer avec cet appareil, dit une voix venue de la pièce voisine.

L’enfant draag sortit. On l’entendit insister:

– J’ai fait une voix d’om avec le plurigraphe. Ça disait: «om libre, la vieille est morte…»

Profitant de sa solitude, un om de luxe, jusque-là couché sur un coussin, sortit de son faux sommeil, bondit sur le plurigraphe et arracha le fil. En une seconde, cachant le fil cassé dans son poing, il reprit sa paresseuse position et ferma les yeux.

– Quelle sottise! dit le père draag en entrant dans la pièce. Ça ne veut rien dire… Tiens, regarde, tu as cassé le fil. Joue à autre chose!

Il prit l’appareil et poussa l’enfant dans la salle de nature. Le petit draag plongea dans la piscine et n’y pensa plus.

3

Penché sur sa téléboîte, Charb prit quelques notes, dit «merci» et jeta un papier sur la table de Terr.

Celui-ci le lut rapidement, sourcils froncés.

– Nous courons ce danger tous les jours, dit-il enfin. Il faut absolument interdire toute communication en clair. Fais le nécessaire pour que les gars du centre 10 établissent un code.

– Cela va tout retarder.

– Je sais bien. Mais imagine que nos télécommunications aient été captées par des draags adultes. Ils nous auraient vite trouvés. Nous aurions échoué tout près du but.

Il se leva et posa la main sur l’épaule de Charb.

– Nous avons une supériorité sur les draags: la rapidité. Notre différence d’échelle nous a poussés à déformer leur langue de telle sorte qu’ils ne peuvent suivre le rythme de nos paroles. De plus, nous avalons la plupart de leurs consonnes. Sans ces petits avantages, il y a longtemps que nous aurions perdu la partie.

Charb suivait son idée.

– Établir un code, l’apprendre. Supprimer pendant ce temps toute télécommunication! Le rythme de nos efforts sera paralysé pendant trois jours au moins!

– Tant pis. Nous pouvons nous le permettre. J’ai parlé de rapidité, à l’instant. Songe qu’il faut un quart de lustre à un draag pour atteindre l’âge adulte. Il ne faut qu’une année à un om!

Il se plongea dans des souvenirs personnels et dit:

– Quand j’ai quitté les draags, Tiwa, ma petite maîtresse, était une fillette. Elle est encore une fillette aujourd’hui. Elle n’a seulement que des rudiments d’instruction. Et moi, je suis un om à barbe blonde. J’ai eu six enfants. J’ai étudié les mathématiques, je connais à fond l’ygamographie et j’ai assez de notions pour parler de n’importe quoi avec nos techniciens. J’ai mis au point des règles provisoires d’économie à l’usage des oms, j’ai jeté les bases de l’économie 2 qui nous servira sur le continent sauvage où nous voulons nous établir. Rapidité, toujours. Nous vivons à un autre rythme et c’est notre principal atout.

Il jeta un regard affectueux sur les graphiques tapissant les murs et poursuivit:

– En un an, nous avons fondé cette ville, organisé des réseaux de renseignements, poussé la natalité, formé des spécialistes, accumulé un matériel fantastique… Nos progrès vont à pas de géant. Pendant la même période, les draags ont tout juste réussi à voter cette petite loi de désomisation que nous avons prise de vitesse. L’exode aura lieu avant que cette loi ne soit appliquée à fond. Je le répète, nous devons perdre ces trois jours, afin de ne pas tout gâcher. D’ailleurs, les télécommunications seront bientôt réservées aux espions seuls. Les raids n’auront plus de raison d’être. Nous avons déjà tout ce qu’il nous faut pour effectuer l’Exode et mettre en application l’économie 2. Nous allons bientôt vivre repliés sur nous-mêmes dans cette ville. Les téléfils suffiront.

Il enfonça un bouton de la téléboîte et dit:

– Ateliers!

L’appareil ronronna un instant, émit quelques déclics avant de laisser sourdre une voix.

– Ici, Central Ateliers; qui parle?

– L’Édile. Où en êtes-vous, pour l’appareil 3?

– Ne quittez pas, Édile. Je vous branche sur la salle 3.

– Ici chef de salle 3!

– Ici l’Édile. Et cette plaque?

– Nous perçons le dernier trou, Édile. Dans une heure, il n’y aura plus qu’à monter sur coque.

– Votre foret s’est usé?

– Ça ira. Le changer nous prendrait plus de temps.

– Bon. Je descends voir.

Terr coupa et se tourna vers Charb.

– Fais le nécessaire, pour le code!

Charb acquiesça en avançant la main vers sa téléboîte. Terr sortit, sauta sur un chariot et se laissa glisser jusqu’aux ateliers.

Il traversa les entrepôts mécaniques, les petits ateliers de précision et parvint aux salles de montage. Dans les deux premières trônaient les appareils terminés: deux énormes vaisseaux fabriqués avec des pièces détachées ravies aux usines draags. Des files d’oms y chargeaient le fret nécessaire à l’Exode.

De la salle 3 filtrait le cri modulé du métal mordu par le métal, et le vaste murmure d’oms haletants sous l’effort. Terr y entra.

Une plaie carrée béait au flanc du troisième vaisseau, montrant des organes de verre et des ganglions de fils multicolores. Plus loin, une plaque courbe était calée sur le sol par des tasseaux de plastique. Juchés sur un échafaudage, une centaine d’oms maintenaient un énorme vilebrequin à la verticale, tandis qu’une autre centaine de travailleurs tournaient sans fin dans les roues d’écureuils entraînant le foret. La sueur coulait par litres le long des entretoises, dégouttait sur la plaque surchauffée, bouillait en dansant au milieu des copeaux de métal. De main en main, des bidons d’huile arrivaient sans arrêt des entrepôts. Une dizaine d’hercules aux muscles vernis par la chaleur vidaient le lubrifiant sous la mèche du foret.

Deux femelles aux cheveux noués sur la nuque abattaient un travail de mâle. Terr s’approcha d’elles.

– Que font-elles ici? demanda-t-il au chef de salle qui s’empressait à sa rencontre.

– Elles sont stériles, répondit l’om. Elles ont demandé à servir autrement.

Terr s’écarta sur le passage d’un bidon roulé par des bras vigoureux. Marchant vers le vaisseau, il grimpa l’échelle menant à l’écoutille. Toujours suivi de l’ingénieur, il entra dans le ventre de l’appareil par un plan incliné. Au passage, ses doigts caressaient amoureusement le lisse des cloisons.

Ses pas le menèrent à la chambre des cartes, derrière le poste de pilotage. À son entrée, un petit groupe d’étudiants se leva.

– Vive l’Édile!

– Ça va bien, dit Terr. Asseyez-vous et continuez votre travail.

Il se pencha sur une carte, posa quelques questions précises, reçut les réponses en ricochets et tourna un sourire vers l’officier instructeur.

– Ma parole, dit-il, ces jeunes en savent plus que moi!

L’officier eut un geste mi-compréhensif, mi-respectueux signifiant: chacun son métier, le vôtre est de commander.

À cet instant, les lumières cliquetèrent trois fois et s’éteignirent.

– Une panne! dit quelqu’un.

Mais les lampes jetèrent trois nouveaux éclairs avant de laisser la nuit s’installer définitivement.

– Une alerte! dit Terr. Plus un geste! Qui peut me passer une lampe de poche?

Un objet froid lui fut glissé dans la main. Il pressa le bouton et balaya la pièce d’un pinceau lumineux.

– Observez les consignes, dit-il brièvement à ses compagnons immobiles. Chef de salle, guidez-moi hors des ateliers.

Dans la salle 3, le travail avait cessé. Perchés sur leurs poutrelles ou disséminés là où l’alerte les avait surpris, les oms restaient immobiles dans une atmosphère étouffante de sueur et de métal brûlant.

Terr traversa rapidement le chantier, quitta le chef de salle et courut dans les couloirs menant au Central de Surveillance. Sur son passage, il croisait des ombres silencieuses. À l’entrée du Centre, quelqu’un l’arrêta.

– Édile! dit Terr en éclairant son visage.

Le factionnaire le laissa entrer. Terr s’élança dans l’escalier menant au Mirador principal. On appelait ainsi certains points stratégiquement disposés en haut des ruines de la ville draag.

Étouffant le bruit de ses pas, il pénétra dans la cabine en éteignant sa lampe. Vaill et Charb s’y trouvaient déjà en compagnie de quelques veilleurs. Vaill désigna l’étendue sableuse, souillée de rares touffes d’herbe. À un demi-stade de la ville, une sphère avait atterri. Un, deux… cinq draags gigantesques vaquaient aux alentours.

Le plus grand s’était juché sur une dune et contemplait l’océan. Un autre, vautré dans le sable, grignotait béatement le contenu d’une boîte de conserve. Les trois derniers se penchaient sur le moteur de la sphère décapotée. Du mirador, on entendait le lourd murmure de leur conversation.

– Ils sont en panne, souffla Charb.

Terr secoua lentement la tête:

– Je n’aime pas ça, dit-il.

Quêtant une explication, ses compagnons lui jetèrent des regards étonnés. Mais il se tut, attentif aux moindres gestes des géants batraciens.

Au bout de longues heures, les draags remontèrent dans leur appareil, qui décolla aussitôt. En quelques secondes, la sphère disparut à l’horizon.

– Fin d’alerte! ordonna Terr.

Et tandis qu’un om transmettait son ordre par téléboîte, il regarda ses amis d’un air grave.

– Aucune sphère ne passe jamais par ici, dit-il. Ces draags sont venus dans un but précis. Leur panne était un simulacre.

Vaill protesta:

– Comment peux-tu être aussi affirmatif?

Terr poursuivit sans répondre directement:

– Avez-vous déjà vu un draag manger couché sur le côté? En avez-vous déjà vu mettre une heure à vider une boîte d’aliments? Celui-là jouait la comédie! Il fiximageait les ruines!

Charb fit un bond.

– Tu es sûr?

– Aussi sûr, dit Terr, que l’autre enfonçait je ne sais quoi dans le sable, avec un air détaché. Il a cerné la ville de détecteurs ou de quelque chose d’approchant, tout en affectant de se promener. Suivez-moi dans les dunes, nous allons voir ça de près.

Ils descendirent du mirador et coururent à l’endroit où le draag avait commencé son travail. Il ne leur fallut pas longtemps pour tirer du sable un objet rond surmonté d’une antenne de métal.

– Qu’est-ce que c’est? demanda Vaillant.

– Je voudrais bien le savoir, dit Terr. Fais-moi porter ça avec précaution jusqu’aux laboratoires.

Il regarda ses amis et ajouta:

– Oms! Le temps presse. Nous effectuerons l’Exode la nuit prochaine. Les draags sont trop lents pour prendre une décision d’ici là.

– Mais le troisième appareil n’est pas prêt!

– Il le sera. Nous allons tripler la cadence. Nous le mettrons à l’eau sans essais. Il n’est plus question de répétition générale. Charb! Fais le nécessaire auprès des chefs de salle. Je veux que l’on charge le troisième navire dès maintenant, sans attendre qu’il soit terminé. S’il y a du retard, nous le remorquerons avec les deux autres.

– Comment n’avons-nous pas été prévenus par les réseaux?

– Les faux oms de luxe ne peuvent pas se glisser partout. Et puis, le Grand Conseil ne se tient pas sur ce continent!

– Les unités de pillage n’auront pas le temps de rentrer.

– Je sais. J’en souffre plus que vous ne pouvez l’imaginer. Mais nous ne saurions sacrifier l’Exode pour quelques vies d’oms. Nous allons prendre un risque, cependant. Vaill, fais rentrer le plus de monde possible par téléboîte. J’espère que tes appels ne seront pas captés. Dis à ceux qui sont trop loin d’interrompre toute activité régulière et de se réfugier là où ils pourront.

Tout en revenant vers les ruines, Terr plissa le front.

– Pourvu qu’ils n’aient pas décelé les trois navires, dit-il. Avons-nous de la tôle fine?

– Je vais demander aux réserves, dit Charb. Mais j’imagine qu’il en reste des mégapoids. Pourquoi?

L’Édile eut un geste vague.

– Je médite un petit truquage pour tromper les draags.


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