Текст книги "Figurante"
Автор книги: Dominique Pascaud
Жанр:
Роман
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Les paysages défilent sous ses yeux. Le train est silencieux. Il file vite. Les couleurs se superposent et forment un camaïeu étrange, entre le gris et le vert, que des pointes, des flèches ocre rouge, viennent lacérer. Elle se sent soulagée. Elle a eu ce qu’elle voulait. Connaître d’autres mondes, même partiellement, un ailleurs qui ne l’a pas comblée, autre chose dans lequel elle ne se retrouve pas. Elle repense à la jeune fille qui aurait pu être une amie, à ces inconnus qu’elle a rencontrés, à ceux qu’elle ne reverra jamais.
Avant son départ, le jeune acteur lui a laissé un message, il ne savait pas qu’elle était là, il voulait la revoir, ils se sont revus, dans un bar. Il n’avait plus la même prestance, le même éclat, et il ne sentait pas aussi bon. Elle voulait le revoir elle aussi pour savoir si ses yeux à lui reflétaient autre chose que du désir. L’endroit était bruyant. Il a posé sa main sur la sienne, a bafouillé, a assuré qu’il voulait continuer à être auprès d’elle, qu’elle lui manquait, qu’il n’avait jamais ressenti cela pour une autre, qu’il aimait sa beauté provinciale. Elle a retiré sa main et a allumé une cigarette, elle lui a dit que tout ça n’était pas fait pour elle. Dans le ça, elle l’incluait. Elle se sentait plus forte que lui, elle ne lui devait rien. Dans sa poche, elle avait déjà son billet de retour. Elle ne pensait plus à lui. Il existait si faiblement à présent, elle était déjà rentrée, elle voulait revoir celui qu’elle avait quitté.
Le bus la ramène chez elle. Elle a jeté ses affaires dans l’entrée et déposé les clés. Elle ouvre toutes les fenêtres et envoie un message à Marc. Peut-être lui répondra-t-il. Voudra-t-il la revoir ? Pour parler, de tout et de rien, de leur vie, des projets, pour s’aimer. Le soleil s’est dissimulé derrière la colline, et cette frontière, encore verte aux abords des terres que de grands arbres poinçonnent d’agrafes entre la plaine et l’horizon, l’atteint toujours au cœur. La vue, depuis la terrasse aux carreaux couleur brique, enchantait son père qui aimait y boire un verre. L’ombre des arbres recouvrait de taches mouvantes son visage selon l’avancée de la journée. Sur la partie sud, à l’endroit le plus chaud, la haie suivait d’un virage le mouvement du carrelage. Elle y installait l’été une baignoire d’enfant pour se rafraîchir et, allongée sur une serviette, elle appréciait la douceur d’une plage de grès glissante sous ses pieds humides.
Elle s’assoit et pense aux travaux à entreprendre, à la décoration, à tout ce qu’elle pourrait faire pour transformer la maison, créer une chambre d’hôtes. Elle n’a que ça. Marc pourrait l’aider et, avec l’argent qu’elle possède, ils auront le temps de voir venir, ils sauront ce qu’ils peuvent faire du vieux manoir qui longe la route des mimosas.
Également dans la collection Littérature
Clichy
Vincent Jolit
Aimée et Louis.
Lorsque le docteur Louis achève la rédaction de son premier roman, il demande à Aimée, la secrétaire du dispensaire de Clichy, de le dactylographier. Son titre : Voyage au bout de la nuit. De cette secrétaire et de son travail, nous savons infiniment peu de choses.
Alors Clichy invente. Il fait réapparaître la première lectrice effacée. Il nous raconte son enfance, ses désirs d’émancipation et la tâche gigantesque qu’elle a accepté d’accomplir. Il lui a fallu traduire, déchiffrer, comprendre, se battre contre ce texte, faire face au trouble qu’il lui inspirait. La jeune femme bien sous tous rapports, très année trente dirons-nous, passe par tous les degrés d’incompréhension et se sent surtout un peu salie d’avoir lu ce qu’elle a lu.
Aimée ne s’est pas contentée de taper le manuscrit livré dans une brouette. Elle a participé à ce roman, aussi indécent lui a-t-il paru. Elle se dit que, sans elle, Louis n’aurait rien fait, il n’aurait pas pu.
Clichy nous raconte l’histoire qui lie, pour toujours, même malgré eux, Aimée à Louis et Louis à Aimée.
Harmonie, harmonie
Vincent Jolit
Terre promise.
Vienne 1900, c’est incontournable. Tout le monde est là : Freud, Mahler, Schnitzler, Loos, Schiele. Et Arnold. Arnold est compositeur. De sa musique complexe et avant-gardiste, personne ne veut. Les spectateurs sifflent, les insultes fusent, les portes claquent. Mais, avec l’aide de ses disciples, Anton et Alban, Arnold insiste, persévère.
Seulement les goûts du public ne sont pas l’unique obstacle à sa réussite. En cette première moitié du XXe siècle, des bouleversements barbares secouent l’Europe qui voit poindre la menace nazie. Et Arnold est juif.
De Vienne et Berlin à Boston et Los Angeles, c’est cette histoire que le roman Harmonie, harmonie raconte. La solitude de cet homme-là qui, d’émeutes en scandales, d’espoirs en désillusions, n’a cessé de croire qu’il avait un rôle primordial à jouer dans l’histoire de la musique. Une mission.
Pour Invalides, changer à OPÉRA
Stéphane Ronchewski
Le goût du large : d’un quai du métro parisien à la mer du Nord.
Un contrôleur de la RATP encore en formation qui se réjouit d’avoir des collègues et même un chef d’équipe. Un drôle de type qui a envie de manger des huîtres dès 8 heures du matin, qui pense que déguster des fruits de mer Gare du Nord, c’est déjà l’océan. À l’écouter, les Parisiens ne savourent pas assez la chance qu’ils ont de prendre le métro tous les jours. Il trouve que ses couloirs sont comme les corbeaux, qu’il n’y en a pas deux pareils.
Qu’est-il donc venu faire là ? Quelle place cherche-t-il à y valider ?
« Je m’offrais le luxe inouï de changer de vie. Je changeais absolument de conversation, d’esthétique, de femmes, de costume, de peau. Je m’aérais la tête beaucoup plus sûrement que si j’avais été dans les Alpes. Je changeais de caste, je quittais le monde. »
Monsieur Butterfly qui attend que sa femme, qui n’est pas encore tout à fait partie, revienne vers lui, il lui rapporte des homards et puis des cirés aux enfants. Mais il sait, au fond de lui, comment l’opéra finit.
Lucky Jim
Kingsley Amis
Une comédie universitaire, héritière de celles d’Evelyn Waugh et mère de celles de David Lodge.
Chargé de cours dans une université de seconde zone, Jim Dixon accumule les déboires professionnels et sentimentaux. Il échoue à faire bonne impression au professeur Welch, le chef de la section d’Histoire, un mandarin dont la paresse n’a d’égal que le ridicule, et est pris au piège du chantage émotionnel qu’exerce sur lui Margaret, une collègue très collante.
Face à l’adversité, Jim dispose néanmoins de quelques ressources : son talent pour les grimaces et son imagination fertile.
Lucky Jim est un roman pour tous ceux qui en sont venus un jour à détester leur métier tout en ne pouvant se permettre de le quitter, et tous ceux – parfois ce sont les mêmes – qui n’ont jamais suffisamment de monnaie sur eux pour se payer à la fois une bière et un paquet de cigarettes.
Kingsley Amis (1922-1995) est un romancier, critique et poète anglais. Lucky Jim (1954) est son premier roman. Son fils, Martin, lui a rendu hommage dans Expérience (2000). Il y écrit à propos du grand écrivain satirique que fut son père : « Lorsque Kingsley vous faisait rire, il pouvait vous faire rire pour le reste de la vie. »
La Maison russe
Tania Sollogoub
Le bonheur, le bruit qu’il fait quand il s’en va.
« Les hommes de notre famille sont toujours morts ruinés, ne laissant à leurs enfants que la certitude d’avoir à se construire seuls. Les hommes de notre famille construisent des maisons pour les détruire ensuite. Ils vivent en dansant, debout sur les tables, persuadés de ne jamais vieillir. Ils rendent les femmes très heureuses puis très malheureuses, mais ils les rendent vivantes. Après un silence, ma sœur a ajouté : Tu te rends compte, ce salaud, il va vendre notre maison. »
À quarante ans, Katia décide d’aller seule, une dernière fois, dans la maison de son enfance. Elle veut y retrouver la table en pierre encore fraîche à l’aube, la mer qu’on voyait des fenêtres et, surtout, les échos d’une voix russe qui la hante, celle de sa grand-mère, qui lui parlait de la vie sous les lauriers roses.
De la mer Noire à la mer Méditerranée, La Maison russe raconte le sentiment d’exil, qui perdure d’une génération à l’autre, et la force du lien entre une petite fille et sa grand-mère.
52nd Street
Emmanuel Solotareff
Premier amour en cinémascope.
New York, hiver 1955. Dans le Queens, entre la radio du voisin, les crêpes brûlées de sa grand-mère et son père qui fait mine de ne rien entendre quand il lui parle de sa mère, Mat se sent à l’étroit. Mais aujourd’hui est une journée particulière : il a reçu de son père une caméra et décide d’aller à Manhattan. Il devrait bien y trouver quelque chose qui mérite d’être filmé, ou vécu.
« C’est à Broadway que je vais enfin enclencher ma caméra. Je le sais, je le sens, il va se passer un truc. Le monde est à moi. Il faut juste choisir. Je descends deux blocs. Tiens, je suis sûr que c’est là-bas qu’elle se dirige aussi, cette nana au manteau de fourrure. Je suis de retour sur la 52e. Gladstone Hôtel. Tous ceux qui sortent d’ici vont quelque part, ça se sent. »
La vie à deux, ou presque
Raphaël Fejtö
Blue notes.
Abel vit avec Sophie à Paris. Abel est réalisateur, Sophie est photographe. Mais elle a d’autres projets de carrière : s’occuper d’un magasin de photocopies, devenir détective ou se marier avec Giorgio, le patron de leur pizzeria préférée. Surtout si Abel ne se décide pas à passer à la vitesse supérieure.
Pendant ce temps-là, Sam vient de s’acheter un skate tellement beau qu’il n’a pas envie d’en faire dehors. Et il a l’impression que Rodolphe lui fait des avances déguisées. Du coup, il appelle Abel pour lui demander conseil. Et puis il y a Toni aussi qui a eu les larmes aux yeux après avoir passé la nuit avec deux Lituaniennes. Forcément, ça le fait gamberger, Abel.
Alors Abel prend des notes, sur ses envies qui ne se concrétisent pas, sur cet achat inconsidéré d’un manteau qui fait robe, sur les parents de Sophie et leur nouvelle maison de campagne, sur l’attitude étrange de la fille du vidéoclub. Des notes qui forment une constellation qui nous raconte le monde d’Abel.
Les Premiers de leur siècle
Christophe Bigot
À l’ombre des génies romantiques.
En entrant sur le conseil de son oncle dans l’atelier d’Ingres, le jeune peintre allemand Henri Lehmann (1814-1882) a-t-il vendu son âme au diable ? Quand ce maître génial mais tyrannique prend la direction de l’Académie de France à Rome, Henri, subjugué, décide de l’y rejoindre.
C’est là, dans les salons enchantés de la Villa Médicis, qu’une autre rencontre va bouleverser sa vie : celle de Marie d’Agoult et de Franz Liszt. Témoin de l’agonie de leurs amours, parrain de leur fils, bientôt homme à tout faire de la comtesse, Lehmann sacrifie peu à peu toutes ses ambitions personnelles et artistiques à la gloire des « premiers de leur siècle ».
Parmi ces derniers, Sainte-Beuve, Chopin, Chassériau, Stendhal ou encore Delacroix croiseront aussi sa route.
À travers les mémoires de celui qui est devenu un peintre académique aigri, c’est toute une époque qui se trouve ressuscitée, avec ses grandeurs et ses bassesses, ses débats mystiques et ses ragots d’alcôve, ses querelles esthétiques et ses révolutions sans lendemain.