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Pièces choisies
  • Текст добавлен: 28 апреля 2021, 03:07

Текст книги "Pièces choisies"


Автор книги: Valentin Krasnogorov



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LE DOCTEUR regarde attentivement le permis de conduire et le rend à JEANNE.

LE DOCTEUR. (Perplexe.) Tout est en ordre.

JEANNE. Vous en doutiez ? Je ne vous demande pas vos papiers, parce que je sais qui vous êtes. Il ne serait pas superflu, bien sûr, de vérifier votre licence, mais cela est l’affaire du parquet et moi je suis avocate. À ce propos, voici ma carte de visite.

LE DOCTEUR. Que me vaut l’honneur de votre visite ?

JEANNE. La santé de mon mari m’inquiète.

LE DOCTEUR. Elle m’inquiète aussi. Mais je préfèrerais en parler avec vous, seul à seule.

JEANNE. (À Michel.) Chéri, attends-moi dans la salle d’attente, ensuite, nous irons ensemble à la maison.

MICHEL sort docilement.

LE DOCTEUR. Savez-vous, que votre… heu-heu… mari est malade ?

JEANNE. Qui mieux que moi peut le savoir ?

LE DOCTEUR. Et savez-vous quelle est sa maladie ?

JEANNE. Il souffre d’amnésie.

LE DOCTEUR. Depuis quand ?

JEANNE. (Étonnée.) Que signifie « depuis quand » ?

LE DOCTEUR. Depuis quand est-il malade ?

JEANNE. (Étonnée.) Comment ? Vous ne savez pas ?

LE DOCTEUR. Pourquoi devrais-je le savoir ?

JEANNE. Mais voyons, vous le suivez depuis deux ans !

LE DOCTEUR. Moi ? Deux ans ??

JEANNE. Docteur, qu’arrive-t-il à votre mémoire ? Comment pouvez-vous soigner des malades, si vous-même ne vous souvenez de rien ?

LE DOCTEUR. Bien, deux ans, soit. Parlez-moi de la maladie de votre mari en termes plus précis. Votre cohabitation est-elle difficile ?

JEANNE. Quelle femme trouve facile de vivre avec son mari ?

LE DOCTEUR. Nous n’allons pas entrer dans les problèmes personnels, parlons des problèmes médicaux. Quelles sont les manifestations concrètes de sa maladie ?

JEANNE. Il se souvient de choses très compliquées et lointaines, et oublie les plus simples. Il peut, par exemple, se remplir une tasse de café et oublier de le boire. Ou bien avaler deux fois le même médicament.

LE DOCTEUR. Ça m’arrive aussi.

JEANNE. (Caustique.) J’ai déjà pu m’en rendre compte.

LE DOCTEUR. Comment supportez-vous tout cela ?

JEANNE. Je suis quelqu’un qui agit en vertu du devoir. Je fais non ce qui me plaît, mais ce que je dois faire. Je mange non ce qui me plaît, mais ce qui contient moins de calories. Je fréquente non ceux qui me sont agréables, mais ceux qui me sont utiles. Je ne vis pas avec le mari avec qui je voudrais être, mais avec celui qui m’est échu. Se plaindre et se lamenter est inutile. Il faut travailler, travailler comme un bœuf et porter sa croix.

LE DOCTEUR. Je vous admire.

JEANNE. Merci. Mais, finalement, mon ex-mari n’est pas une si mauvaise personne. Il y a pire. Je me répète cela cent fois par jour. Chaque femme devrait se le répéter. Il y a pire.

LE DOCTEUR. Pourquoi avez-vous dit « ex-mari » ? Seriez-vous divorcés ?

JEANNE. Pas le moins du monde. Nous sommes légalement mariés. Mais qu’est-ce qu’un mari qui oublie ce qu’un mari – un homme – ne doit pas oublier ? Vous me comprenez ?

LE DOCTEUR. M-m-m… Et que faites-vous dans ces cas-là ? Vous le lui rappelez ?

JEANNE. S’il faut rappeler à un homme de telles choses, alors il n’y a plus rien à espérer.

LE DOCTEUR. Vous avez raison.

JEANNE. Savez-vous, à quelle conclusion m’a amenée l’exercice du droit ? Plus il y a d’hommes qui oublient, plus il y a de femmes qui souffrent.

LE DOCTEUR. L’exercice de la médecine aussi arrive à la même conclusion. Cependant, dites-moi, ne vous est-il pas venu à l’esprit, que l’oubli de ces choses par votre mari, pouvait s’expliquer par le fait que… hum-hum…

JEANNE. Qu’il a une femme ?

LE DOCTEUR. C’est vous qui l’avez dit, pas moi.

JEANNE. Ne me faites pas rire, cela est exclu.

LE DOCTEUR. Oui ? Et comment réagiriez-vous si nous faisions la supposition que, peu avant vous, serait venue avec lui ?… Comment vous dire ça ?… Naturellement, ce n’est qu’une supposition…

JEANNE. Ne tournez pas autour du pot, docteur. Jouez franc jeu. J’ai les nerfs solides.

LE DOCTEUR. N’allez pas le juger. Selon moi, il a oublié qui était sa femme.

JEANNE. Il s’en souvient parfaitement. (Elle appelle son mari.) Michel !

MICHEL entre.

JEANNE. Chéri, dis à cette personne, comment je m’appelle.

MICHEL. L’aurait-il oublié ?

JEANNE. Il l’a su, mais il l’a oublié. (Avec ironie.) Cette personne souffre d’amnésie.

MICHEL. (Au docteur.) Je suis sincèrement désolé pour vous.

LE DOCTEUR. Moi aussi je suis désolé pour moi.

MICHEL. Pourquoi ne suivez-vous pas un traitement ? Je peux vous recommander un bon médecin. Voici sa carte de visite.

LE DOCTEUR. (Jetant un œil sur la carte.) Je vous remercie, c’est ma carte ! Dites-nous, plutôt, comment s’appelle cette dame.

MICHEL. Étrange question. Vous pensez que je ne sais pas comment s’appelle ma propre femme ? Ma femme, avec qui j’ai été dans la même école ?

LE DOCTEUR. Bon, mais comment s’appelle-t-elle, bon sang ?

MICHEL. Jeanne. Pourquoi ?

JEANNE. Rien, chéri. Tu peux retourner dans la salle d’attente. (Sur un ton sévère.) Et tu n’en bouges pas !

MICHEL sort.

LE DOCTEUR. Bizarre. Si ce n’était pas sa femme, qui était-ce, donc ?

JEANNE. Qui ?

LE DOCTEUR. La femme qui était ici avant vous.

JEANNE. Si c’est vrai, alors je sais qui elle est.

LE DOCTEUR. (Avec intérêt.) Tiens donc ? Et qui est-elle ?

JEANNE. Une putain doublée d’une affairiste.

LE DOCTEUR. Vous y allez un peu fort. Elle m’a semblé tout à fait attirante.

JEANNE. Malheureusement, les putains sont toujours attirantes. À la différence de nous, les honnêtes femmes.

LE DOCTEUR. Bon, vous la connaissez ou non ?

JEANNE. Bien sûr que non, et je ne veux pas la connaître. Je ne fraye pas avec de telles personnes. Du reste, aucune femme, en réalité, n’est venue ici et vous le savez parfaitement.

LE DOCTEUR. Il est venu une femme.

JEANNE. Elle n’est pas venue.

LE DOCTEUR. Elle est venue. (S’essuyant le front.) Mais, peut-être, en effet, n’est-elle pas venue.

JEANNE. Excusez-moi, je veux vérifier si Michel est toujours là. Il faut toujours avoir un œil sur lui.

JEANNE sort et revient.

LE DOCTEUR. Toujours là ?

JEANNE. Oui.

LE DOCTEUR. Dommage.

JEANNE. Cessons ces discussions sur les femmes et passons aux choses sérieuses. Je ne suis pas venue ici pour entendre des récits fantastiques, mais pour le certificat médical de mon mari.

LE DOCTEUR. Pour établir un certificat médical, je dois d’abord étudier sa maladie. C’est pourquoi je vous demande depuis quand…

JEANNE. (L’interrompant.) Premièrement, je vous ai tout dit, vingt fois déjà.

LE DOCTEUR. (Très étonné.) Quand ?

JEANNE. (Sans l’entendre.) Deuxièmement, au lieu de poser des questions inutiles, vous feriez mieux de regarder sa carte médicale. Elle est dans votre ordinateur. Il y a tout.

LE DOCTEUR. Je n’ai aucune carte médicale le concernant !

JEANNE. Que dois-je comprendre ? Seriez-vous à ce point négligent que vous ne la remplissez pas ? Vous savez parfaitement que cette négligence est assimilable à une faute professionnelle !

LE DOCTEUR. Vous vous oubliez !

JEANNE. (Sur un ton dur.) Nullement. Je ne souffre pas encore d’amnésie. Et je tiens à vous rappeler que la carte médicale est un document non seulement médical, mais aussi juridique. En cas de plainte légale contre vous de la part du malade, elle permettra d’établir la conformité ou la non-conformité du traitement prescrit par vous. Je crains que vous ne l’ayez pas remplie ou que vous l’ayez sciemment effacée pour masquer aux finances publiques les sommes que vous avez perçues de nous pour les visites.

LE DOCTEUR. Je n’ai reçu aucune somme !

JEANNE. Ne vous inquiétez pas, nous n’avons pas l’intention de vous demander de les rendre. La seule chose que je veux, c’est un certificat attestant de l’état de gravité dans lequel se trouve mon mari et sa carte médicale.

LE DOCTEUR. (Il est complètement déconcerté.) Le certificat, à la limite, je peux vous le donner, mais…

JEANNE. (Intraitable.) Ainsi que la carte médicale.

LE DOCTEUR. Où vais-je la trouver ?

JEANNE. Dans votre ordinateur. Dans le tiroir de votre bureau. Est-ce que je sais moi ? Trouvez-la, refaites-la, cela ne me regarde pas. Que la carte médicale soit prête dans une heure ! Dans exactement soixante minutes je reviens la chercher ! Et n’essayez pas à nouveau de vous trouver une quelconque excuse comme la dernière fois.

JEANNE se dirige vers la sortie. À l’entrée, elle se heurte à un nouveau visiteur. C’est un homme d’apparence très respectable, vêtu d’un costume strict bien taillé. Ils se lancent un regard furtif. JEANNE sort. L’HOMME ne remarque pas tout de suite LE DOCTEUR, apparu de derrière un paravent. En l’apercevant, il sursaute.

LE DOCTEUR. En quoi puis-je vous être utile ?

L’HOMME. (Tressaillant.) Je… je… je…

LE DOCTEUR. Qui êtes-vous ?

L’HOMME. Je… je… je…

LE DOCTEUR. Oui, vous, vous, vous ! Pas moi, que diable !

L’HOMME. Je… Je ne pense pas que mon nom ait quelque importance pour vous.

LE DOCTEUR. Alors, pourquoi ne le donneriez-vous pas ?

L’HOMME. En effet, pourquoi ?

LE DOCTEUR. C’est bien ce que je dis, pourquoi ?

L’HOMME. Tenez, vous voyez, nous disons tous les deux « pourquoi ».

LE DOCTEUR. Alors, pourquoi, malgré tout, ne le donnez-vous pas ?

L’HOMME. Parce que je n’en vois pas la nécessité.

LE DOCTEUR. Cessez de tourner autour du pot et parlez franc : de quoi souffrez-vous ?

L’HOMME. Puis-je parler avec vous d’homme à homme ?

LE DOCTEUR. Le voudrions-nous que nous ne pourrions parler de femme à femme.

L’HOMME. Vous avez raison.

LE DOCTEUR. Eh bien, accouchez, ne craignez rien, qu’est-ce qui vous amène ?

L’HOMME. Je ne sais par quoi commencer…

LE DOCTEUR. Soyez plus hardi, vous n’avez pas à avoir honte du tout. La quasi-totalité des hommes rencontrent ces problèmes-là.

L’HOMME. Comment connaissez-vous mes problèmes ?

LE DOCTEUR. Je les devine.

L’HOMME. Vous ne pouvez pas les connaître. Le fait est que… Comment le dire…

LE DOCTEUR. Allons, allons, ne rougissez pas. Vous êtes venu voir un médecin. Et ici, les secrets sont gardés.

L’HOMME. (Après hésitation.) Bon, ça va. Pour être honnête, j’avais d’abord décidé de me faire passer pour malade. Mais maintenant, je me dis, pourquoi ne pas dire les choses comme elles sont ?

LE DOCTEUR. Ainsi, vous n’êtes pas malade ?

L’HOMME. Non.

LE DOCTEUR. Que faites-vous donc ici ?

L’HOMME. Je cherche une femme.

LE DOCTEUR. Puis-je vous confier un secret ? Je ne suis pas une femme.

L’HOMME. Ce n’est pas le moment de plaisanter. L’affaire est très sérieuse.

LE DOCTEUR. Qui est-elle pour vous ? Votre épouse, peut-être ?

L’HOMME. (Après une certaine hésitation.) Oui.

LE DOCTEUR. Mais qu’est-ce que je viens faire là ?

L’HOMME. Je sais, qu’elle sort juste d’ici.

L’HOMME. Je ne diffuse pas d’informations concernant mes visiteurs.

L’HOMME. Cette fois-ci, vous devez faire une exception.

LE DOCTEUR. J’aimerais bien savoir pourquoi !

L’HOMME. Parce que je l’aime à en perdre la mémoire.

LE DOCTEUR. Vous aimez votre femme ?!

L’HOMME. Oui. Et alors ?

LE DOCTEUR. Non, rien. C’est très touchant.

L’HOMME. Bon, où est-elle ?

LE DOCTEUR. Votre femme n’est pas venue ici.

L’HOMME. Elle est venue, je le sais avec certitude.

LE DOCTEUR. Son nom ?

L’HOMME. Grelot.

LE DOCTEUR. (Stupéfait.) Grelot ? Vous en êtes sûr ?

L’HOMME. Certain.

LE DOCTEUR. Pas Goulot ?

L’HOMME. Non.

LE DOCTEUR. Bibelot ? Angelot ?

L’HOMME. Je vous dis que non.

LE DOCTEUR. M-m-m, m-m-m… (Gagné par l’émotion, il arpente la pièce.) Donc, votre femme s’appelle… Vous pouvez me rappeler comment ?

L’HOMME. Grelot.

LE DOCTEUR. Fantastique. En entrant dans ce cabinet, vous avez, ce me semble, croisé à la porte une personne. Vous vous rappelez ?

L’HOMME. Vous avez en vue la femme en costume prince de galles ajusté, aux yeux sombres, avec un grain de beauté sur la joue gauche, une petite écharpe de gaze lilas autour du cou et un sac à main noir ?

LE DOCTEUR. Elle, en effet. Que pouvez-vous dire sur elle ?

L’HOMME. Rien. Je ne lui ai pas prêté la moindre attention.

LE DOCTEUR. M-m-m, m-m-m… vous ne lui avez pas prêté attention. Pas la moindre. (Explosant.) Foutez le camp, et que je ne vous revoie plus ici !

L’HOMME. Docteur, je ne vous comprends pas. Pourquoi…

LE DOCTEUR. (L’interrompant.) Mais parce que vous vous êtes retrouvé nez à nez, à l’instant, avec madame Grelot. Admettons que vous ne lui ayez pas prêté attention. Mais elle aussi vous est passée devant tranquillement !

L’HOMME. Mais qui elle est, je n’en ai aucune idée ! Je ne l’ai jamais vue auparavant !

LE DOCTEUR. Donc, ce n’est pas votre femme ?

L’HOMME. Bien sûr, que non ! De plus, je suis divorcé depuis longtemps. Depuis deux ans.

LE DOCTEUR. Comment ça « divorcé » ? Mais vous aimez votre femme à en perdre la mémoire !

L’HOMME. Oui-oui, bien sûr… Ensuite, je me suis remarié.

LE DOCTEUR. Vous vous êtes remarié ? Très bien. Et votre femme s’appelle, vous m’avez dit…

L’HOMME. Grelot. Irène Grelot.

LE DOCTEUR. Comment avez-vous dit ? Irène ?

L’HOMME. Oui, Irène.

LE DOCTEUR. Mais, voyons, elle est mariée ! Avec Michel.

L’HOMME. (Il est stupéfait.) Avec quel Michel ?

LE DOCTEUR. Son mari.

L’HOMME. Ça ne se peut pas ! Elle n’est pas mariée ! Je veux dire, qu’elle est mariée avec moi.

LE DOCTEUR. Mais qu’est-ce que vous attendez de moi ?

L’HOMME. Je sais qu’elle est venue ici. Il est probable qu’elle revienne encore. Aidez-moi à la rencontrer.

LE DOCTEUR. Mon métier n’est pas de rechercher les femmes des autres. Et je ne suis pas certain qu’Irène soit votre femme. Et qu’elle s’appelle Irène. Et qu’elle viendra ici. Et je suis encore moins certain qu’elle existe vraiment.

L’HOMME. Elle existe !

LE DOCTEUR. Alors, rentrez chez vous et attendez-la là-bas. (Il le pousse vers la sortie.)

L’HOMME. (Opposant une résistance.) Docteur, je vous en supplie…

LE DOCTEUR. Je ne peux vous aider en rien. Au revoir. Pas par là, cette porte n’est destinée qu’à l’entrée des patients. Par ici, s’il vous plaît.

LE DOCTEUR accompagne L’HOMME vers la sortie de secours et reste seul près de la table où est posée la valériane. Son visage reflète une évidente perplexité.

FIN DU PREMIER ACTE

ACTE II

LE DOCTEUR est dans son cabinet. Entre IRÈNE, dans une robe très élégante.

IRÈNE. (Gaiement.) Bonjour, docteur ! Me revoilà !

LE DOCTEUR. (Extrêmement froid.) Si je peux me permettre, qui êtes-vous ?

IRÈNE. (Étonnée, mais non sans coquetterie.) Dieu, que se passe-t-il avec votre mémoire ? Trente petites minutes et vous m’avez oubliée ! Il a suffi que je change de robe pour que vous ne me reconnaissiez plus !

LE DOCTEUR. Je vous reconnais parfaitement. Et c’est précisément pour cela que j’aimerais savoir, qui vous êtes. Montrez-moi vos papiers d’identité.

IRÈNE. Pour quoi faire ? Je m’appelle Irène, vous le savez, voyons.

LE DOCTEUR. Comment puis-je savoir que vous vous appelez vraiment Irène ? Du reste, quand bien même ce serait Irène, cela ne signifie rien. Vos papiers, s’il vous plaît.

IRÈNE. Je ne les ai pas avec moi.

LE DOCTEUR. Et moi, je vous redemande encore une fois : vos papiers !

IRÈNE ouvre son sac, fouille, mais au lieu de la carte d’identité prend un mouchoir, sanglote et commence à essuyer ses larmes.

LE DOCTEUR. (Inquiet.) Qu’avez-vous ?

IRÈNE ne répond pas. LE DOCTEUR verse dans un verre de l’eau de la carafe et l’apporte à IRÈNE.

IRÈNE. (Repoussant le verre.) Laissez-moi !

LE DOCTEUR. Que se passe-t-il ? Vous m’en voulez ? Vous ai-je froissée ?

IRÈNE. Selon vous ?

LE DOCTEUR. Mais comment ?

IRÈNE. (À travers des larmes.) Et vous osez demander comment ? Vous m’aviez fait très bonne impression, mieux encore, vous m’aviez plu. Il m’avait même semblé que vous aussi étiez, en quelque mesure, bien disposée à mon égard… Je suis venue vers vous le cœur à découvert, et comment suis-je reçue en fait ? Avec froideur, méfiance, soumise à un interrogatoire humiliant… (Elle sanglote.)

LE DOCTEUR. Calmez-vous…

IRÈNE. Laissez-moi partir.

LE DOCTEUR. (La retenant.) Vous ne connaissez pas toutes les circonstances. Le fait est qu’en votre absence est venue… C’est sans importance.

IRÈNE. Qui est venu ? Une autre femme ?

LE DOCTEUR garde le silence, troublé.

Et elle aussi a dit qu’elle était sa femme ?

LE DOCTEUR. Oui.

IRÈNE. Et alors ? Ne me dites pas que vous l’avez crue ? Arrivez-vous à tenir un compte des fous qui viennent vous voir ?

LE DOCTEUR. Oui mais voilà, Michel l’a reconnue comme étant sa femme.

IRÈNE. Vous ignorez qu’il n’a pas de mémoire ? Et puis, est-elle vraiment venue ?

LE DOCTEUR. Oui, bien sûr.

IRÈNE. (Elle s’approche de la porte et appelle Michel.) Chéri, viens.

Entre MICHEL.

Dis-moi, est-ce qu’une femme est venue ici en mon absence ?

MICHEL. (Le plus tranquillement du monde.) Je n’ai vu personne.

IRÈNE. A-t-elle dit qu’elle était ta femme ?

MICHEL. Comment aurait-elle pu le dire, si elle n’est pas du tout venue ?

IRÈNE. Et toi, tu as dit qu’elle était ta femme ?

MICHEL Je n’ai que toi au monde, et tu le sais très bien. (Il l’embrasse.)

IRÈNE. Merci, chéri. (Au docteur.) Eh bien, me croyez-vous maintenant ?

LE DOCTEUR. Je ne sais pas quoi penser… d’ailleurs, il y a encore une circonstance… Outre la femme, un homme aussi est venu…

IRÈNE. Et alors ?

LE DOCTEUR. Il a affirmé qu’il… qu’il était votre mari.

IRÈNE. Mon mari ? (Elle rit bruyamment.) Mon Dieu, quel dur métier que celui de psychiatre ! Qui ne voyez-vous pas défiler ! (Elle continue de rire.)

LE DOCTEUR. Je ne vois pas ce qu’il y a de risible.

IRÈNE. Mais le voici, mon mari, là, devant vous ! Il vous faut d’autres preuves ? Qu’à cela ne tienne. (À Michel.) Chéri, ôte ta chemise et montre au docteur ton grain de beauté sous ton omoplate gauche.

MICHEL, obéissant, ôte sa chemise. LE DOCTEUR examine le grain de beauté. IRÈNE s’adresse au DOCTEUR.

Vous en êtes-vous convaincu ?

MICHEL. Docteur, ce grain de beauté n’est-il pas dangereux ?

LE DOCTEUR. Non.

MICHEL. (S’accrochant.) Malgré tout, je vous demanderai de me l’enlever. Je crains qu’il dégénère en une tumeur maligne.

LE DOCTEUR. Je vous assure qu’elle est inoffensive. Et de plus, je ne suis pas chirurgien.

MICHEL. Êtes-vous urologue ? Ça tombe bien, j’ai justement de gros problèmes de ce côté-là. Je vais vous montrer… (Il porte la main à la ceinture.)

LE DOCTEUR. Ce n’est pas la peine !

MICHEL. Je vous montre, quand même. Puisque vous êtes urologue…

IRÈNE. (L’interrompant.) Merci, chéri, ce n’est pas la peine. Attends-moi, s’il te plaît, dans la salle d’attente. Mais ne t’en va pas. (Avec insistance.) Tu as retenu ? Ne t’en va pas. Nous n’allons pas tarder à rentrer à la maison ensemble.

MICHEL sort.

LE DOCTEUR. Excusez-moi, si je me suis permis de douter de vous. Je dois l’avouer, cet homme m’a fait perdre le sens.

IRÈNE. Mais vous êtes certain qu’il est vraiment venu ?

LE DOCTEUR. Que signifie « certain » ? Bien sûr, qu’il est venu ! (Déconcerté.) Ou il n’est pas venu ? Bon, admettons, qu’il soit, comme vous dites, fou. Mais la femme m’a montré ses papiers d’identité, alors que vous, excusez-moi, je ne sais même pas comment vous vous appelez.

IRÈNE. Comment ça, vous ne savez pas ? Pas plus tard que ce matin, vous m’avez téléphoné deux fois en m’appelant Irène.

LE DOCTEUR. (Au bout du rouleau.) Ah ! oui, c’est vrai… J’avais oublié…

Pendant ce temps, IRÈNE range son mouchoir, prend son poudrier et se refait une beauté. Rangeant le poudrier dans son sac, elle pousse un cri de joie.

IRÈNE. Oh ! Finalement, j’ai un document. Et en plus avec photo. Mon permis de conduire. Tenez, regardez, je vous prie.

LE DOCTEUR. Pas la peine, je vous crois.

IRÈNE. Là, vous me croyez, mais dans cinq minutes vous cesserez à nouveau de me croire. Comme tous les hommes. Regardez, quand même.

LE DOCTEUR prend le permis à contrecœur.

Que lisez-vous ?

LE DOCTEUR. « Irène Grelot ».

IRÈNE. Tout est en règle ?

LE DOCTEUR. Oui.

LE DOCTEUR rend le document à IRÈNE. Elle le fait disparaître dans son sac et en prend des photographies.

IRÈNE. Mon mari vous a-t-il dit que nous étions à la même école ?

LE DOCTEUR. Quel mari ? Michel ? Oui.

IRÈNE. Tenez, regardez, comment nous étions, enfants. Rigolos, n’est-ce pas ?

LE DOCTEUR. Vous n’avez pas beaucoup changé.

IRÈNE. Merci. Et là, nous sommes déjà adultes.

LE DOCTEUR. C’est sûrement peu de temps avant le mariage ?

IRÈNE. Oui.

LE DOCTEUR. Comme vous êtes belle ici !

IRÈNE. (Coquette.) Vous voulez dire que maintenant je ne le suis plus ?

LE DOCTEUR. Maintenant, vous l’êtes encore plus.

IRÈNE. Merci. (Faisant disparaître les photographies.) Je vois que vous êtes un homme à femmes. Je ne sais pas si une femme est venue ici, mais ce dont je suis sûre, c’est que vous l’avez invitée à dîner.

LE DOCTEUR. Je vous jure que je n’ai invité personne ! Et, en gros, personne n’est venu ! (Perplexe.) Ou il est venu quelqu’un ? Maudite mémoire… (Il se verse à nouveau une dose de gouttes.)

IRÈNE. (Elle lui confisque la fiole.) Cessez de prendre des gouttes. Avez-vous un alcool ?

LE DOCTEUR. Je dois avoir une bouteille de cognac.

IRÈNE. Eh bien, buvez double dose. Ça aide instantanément.

LE DOCTEUR. Nous allons vérifier. (Il ouvre le bar.) Oui, j’en ai ! (Il prend une bouteille.) Vous m’accompagnez ?

IRÈNE. Buvez, vous dis-je, l’effet est instantané.

LE DOCTEUR. Nous allons vérifier. (Il ouvre le bar.) J’ai beaucoup de cognac. (La mine réjouie.) Donc, je suis médecin ! (Il prend une bouteille.) Vous m’accompagnez ?

IRÈNE. Je ne vous ai pas encore pardonné.

LE DOCTEUR. Allez, oubliez ça. Buvons. (Les mains tremblantes, il remplit les verres de cognac.)

IRÈNE. (Le regardant avec pitié.) Mon cher, regardez-vous dans une glace. Que vous arrive-t-il ?

LE DOCTEUR. Je dois avouer qu’aujourd’hui je ne suis pas du tout en forme…

IRÈNE. Stop. Vous avez tout bonnement besoin qu’une douce main féminine s’occupe de vous, voilà tout. Avez-vous une femme ?

LE DOCTEUR. Une femme ? (Il réfléchit.) Je ne m’en souviens pas… que dis-je ? Bien sûr que je me rappelle. Je suis veuf, depuis des années. Mes enfants sont adultes, ils ne vivent pas avec moi. Je suis tout à fait seul… Vous savez, j’envie même votre mari. Moi aussi je jetterais tout aux oubliettes avec joie : la solitude, le travail éreintant, les inspecteurs des impôts, les collègues envieux, les patients entêtés avec leurs éternelles plaintes et maladies, et aussi du même coup mes propres maladies. Ne penser à rien, ne rien se rappeler, rester assis à côté d’une belle femme à boire un verre de cognac, tout oublier et ne jouir que de la minute présente…

IRÈNE. Eh bien, vivez le présent. Remettez à plus tard vos considérations, et maintenant laissez-vous aller à la joie de vivre. (Elle lève son verre.) À votre santé et à vos succès ! Au bonheur !

LE DOCTEUR. Merci. Je me sens si à l’aise avec vous. Il émane de vous une certaine lumière. Vous êtes, sûrement, très heureuse. (Il la prend par la main.)

IRÈNE. (Sans retirer sa main.) N’allez pas croire que j’ai une vie facile. Moi aussi, je sais ce qu’est la solitude.

LE DOCTEUR. Mais vous avez Michel.

IRÈNE. (L’air inquiet.) À propos, il faut vérifier s’il n’est pas parti. (Elle sort et très vite revient.)

LE DOCTEUR. Il n’a pas bougé ?

IRÈNE. Non.

LE DOCTEUR. Dommage.

IRÈNE. Je dois y aller. J’appelle un taxi et j’emmène Michel .

LE DOCTEUR. Notre rendez-vous d’aujourd’hui tient toujours ?

IRÈNE. Si vous ne changez pas d’avis et si vous n’oubliez pas.

LE DOCTEUR. (Avec flamme.) Moi, oublier ? Mais je… (Se remémorant la soudaine et étrange amnésie dont il avait été frappé.) Je vais le noter. À tout hasard. (Il écrit dans son agenda.)

IRÈNE. (Se levant.) Et n’oubliez pas de préparer la fiche médicale et le certificat médical.

LE DOCTEUR. Pour vous, je ferai tout ce qui vous plaira. Je vous raccompagne ?

IRÈNE. Non, merci.

IRÈNE sort. LE DOCTEUR, requinqué, s’assoit devant son ordinateur. Entre L’HOMME. Il se conduit tout à fait autrement que lors de la première fois. Ses manières sont pleines d’assurance et de résolution.

LE DOCTEUR. Encore vous ?

L’HOMME. Comme vous le voyez.

LE DOCTEUR. Que voulez-vous de moi ?

L’HOMME. Je mène une petite enquête privée.

LE DOCTEUR. J’avais tout de suite compris que vous étiez détective.

L’HOMME. Je ne suis pas détective. Je suis du fisc.

LE DOCTEUR. Si vous êtes inspecteur des impôts, présentez vos documents.

L’HOMME. (Sèchement.) Où est Irène ?

LE DOCTEUR. Hélas, je ne vous serai d’aucune utilité. Comme vous le voyez, elle n’est pas là.

L’HOMME. Je l’ai bien vue entrer ici, il y a vingt minutes.

LE DOCTEUR. Mais vous ne l’avez pas vue partir, il y a une minute.

L’HOMME. Elle reviendra ?

LE DOCTEUR. Je ne sais pas. Que lui voulez-vous ?

L’HOMME. C’est quelque chose que je n’ai pas le droit de vous dire.

LE DOCTEUR. Pas le droit, eh bien, ne le dites pas. Au plaisir de vous revoir.

L’HOMME. Il me faut la trouver d’urgence, vous comprenez ? C’est une question de vie et de mort.

LE DOCTEUR. Vous n’êtes pas dans une agence de détective. Aussi, cherchez-la dehors. Et, s’il vous plaît, ne me faites pas perdre mon temps. Au fait, les consultations dans mon cabinet sont très onéreuses.

L’HOMME. Je suis prêt à payer, si vous m’aidez à la retrouver.

LE DOCTEUR. Je ne prends pas de pots-de-vin.

L’HOMME. Non !?

LE DOCTEUR. Je reçois des honoraires.

L’HOMME. Mais je suis prêt à vous verser des honoraires.

LE DOCTEUR. Je ne les perçois qu’en échange d’un traitement et non pas en échange de renseignements donnés. Je vous souhaite de réussir, et ne m’empêchez pas de travailler. Je ne reçois que sur rendez-vous. (Il entraîne poliment L’Homme vers la sortie de secours.) Je vous en prie. Non, pas par cette porte. Par celle-ci, n’entrent que mes malades.

L’HOMME. Bon, dans ce cas, je vous enverrai vraiment l’inspecteur des impôts. (Il regarde attentivement le Docteur.) Non, vous avez eu peur ?

LE DOCTEUR. Pas tellement.

L’HOMME. Vous devriez. Je suis sûr que vous n’aimez pas payer des impôts.

LE DOCTEUR. Moi je n’aime pas ?

L’HOMME. Vous.

LE DOCTEUR. Moi ?!

L’HOMME. Vous.

LE DOCTEUR. Et alors ? Et qui aime ça ?

L’HOMME. Et si nous organisions un petit contrôle ?

LE DOCTEUR. Faites, donc. Je sais bien cacher mes revenus.

L’HOMME. Et moi, je sais bien les retrouver.

LE DOCTEUR. Cessez de me menacer. Je vous l’ai dit, je ne crains pas les contrôles.

L’HOMME. Parce que vous ne prenez pas de pots-de-vin ?

LE DOCTEUR. Non. Parce que je les donne. Au plaisir de vous revoir.

L’HOMME. (Changeant de ton.) Docteur, vous le savez bien, l’affaire que j’ai en ce moment est strictement personnelle, elle n’a aucun rapport avec la médecine, ni avec le fisc. J’ai besoin d’Irène.

LE DOCTEUR. Au revoir. La porte de sortie est ici.

L’HOMME. (S’attardant au moment de sortir.) Docteur, pourquoi, tout de même, vient-elle vous voir ? Il y a quelque chose entre vous ?

LE DOCTEUR. Cela ne vous regarde en aucune façon.

L’HOMME. Serait-elle malade ?

LE DOCTEUR. Aucun détail concernant mes visiteurs, malades ou bien portants, ne franchit les limites de ce cabinet.

L’HOMME. (D’un ton sec, presque menaçant.) Parfait. Cependant, je sens qu’il y a un lien entre vous et je pense qu’il est de mon devoir de vous prévenir : soyez prudent.

LE DOCTEUR. Dans quel sens ?

LE DOCTEUR. Dans tous les sens. Elle s’est oubliée et elle-même ne comprend pas ce qu’elle fait. (Il se dirige vers la sortie.) Si, malgré tout, vous la voyez, dites-lui que j’essaierai de la voir à la maison, et si je ne l’y trouve pas, que je reviendrai ici.

LE DOCTEUR. Je ne pense pas que je vous laisserai entrer.

L’HOMME. Et moi, je ne pense pas que je vous en demanderai l’autorisation.

L’HOMME part. LE DOCTEUR se rassoit devant son ordinateur. IRÈNE revient.

IRÈNE. Vous n’en avez toujours pas assez de moi ?

LE DOCTEUR. Le taxi est déjà là ?

IRÈNE. Je ne l’ai pas appelé… J’ai décidé d’emmener Michel dans ma voiture. Elle est là, tout près, sur le parking. Surveillez-le deux minutes encore, d’accord ? (Après avoir bien regardé le Docteur.) Qu’y a-t-il encore ?

LE DOCTEUR. À l’instant… Eh bien… Il a de nouveau demandé après vous… Votre mari…

IRÈNE. Je vous l’ai déjà dit, je n’ai aucun mari ! À part Michel, bien sûr.

LE DOCTEUR. Je ne sais pas, je ne sais pas… Il m’a prévenu qu’il fallait que je sois prudent avec vous.

IRÈNE. Il n’a pas expliqué de quoi il retournait ?

LE DOCTEUR. Non, mais il a dit que c’était très important. Une question de vie et de mort.

IRÈNE. (Fortement troublée.) Je crois que je devine de qui il s’agit.

LE DOCTEUR. Il est vraiment votre mari ?

IRÈNE. Pas tout à fait.

LE DOCTEUR. Pas tout à fait ?

IRÈNE. Pas du tout. C’est mon collègue de travail… plus exactement, c’est même mon supérieur.

LE DOCTEUR. Vous dites la vérité ?

IRÈNE. Je vous jure.

LE DOCTEUR. Et de quelle affaire importante vous concernant parle-t-il ?

IRÈNE. Des bêtises. Simplement, il, comment vous dire… Il y a des gens, voyez-vous, qui… Il est continuellement à vouloir élucider quelque chose avec moi, à vouloir m’entretenir de quelque chose… Et c’est toujours, bien sûr, urgent. Du reste, voilà un patient idéal pour vous.

LE DOCTEUR. Je comprends.

IRÈNE. Bon, je vais chercher la voiture.

LE DOCTEUR. (La retenant.) Je n’ai pas envie de vous laisser partir.

IRÈNE. (Dégageant la main avec douceur.) Je reviens vite. Une minute, pas plus.

LE DOCTEUR. Et vous repartirez.

IRÈNE. (L’embrassant sur la joue.) Pour notre rendez-vous de ce soir.

IRÈNE sort. LE DOCTEUR arbore un sourire heureux. Il s’approche de la glace, s’examine sans concession, redresse la cravate, arrange sa coiffure, sort de l’armoire une autre veste aux couleurs plus vives et la met. Entre JEANNE, plus décidée encore que précédemment. LE DOCTEUR, qui s’était préparé à accueillir à bras ouverts sa visiteuse, est désagréablement surpris.

LE DOCTEUR. C’est vous ?

JEANNE. Pourquoi ? Qui attendiez-vous ?

LE DOCTEUR. Une autre femme. La femme de votre mari. Ou plutôt… Je voulais dire, la femme de Michel. Ou plutôt…

JEANNE. La femme de Michel, c’est moi.

LE DOCTEUR. J’ai un gros doute là-dessus, maintenant.

JEANNE. C’est la première fois que je rencontre un docteur qui, au lieu de s’occuper de soigner, mène une enquête. La carte médicale est-elle prête ?

LE DOCTEUR. Non. Et si elle l’était, je ne vous la donnerais pas. Qui êtes-vous, au juste ?

JEANNE. J’avais prévu que vous chercheriez n’importe quel prétexte pour vous défausser et j’ai préparé à cet effet un registre complet de documents en bonne et due forme. (Elle montre un dossier soigneusement constitué.) Voici ma carte d’identité. Voici le livret de famille prouvant mon mariage avec Michel. Voici les certificats de naissance de nos enfants, dans lesquels, d’ailleurs, sont enregistrés aussi les noms de leurs parents, autrement dit, le mien et celui de mon mari. Voici la photographie de mariage, voici également une photo du mariage mais avec les invités, et voici des photos où nous sommes avec les enfants. Voici des factures d’électricité ainsi que d’autres paiements à notre nom. Vous êtes convaincu maintenant ?


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