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Том 6. Проза, письма
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Текст книги "Том 6. Проза, письма"


Автор книги: Михаил Лермонтов



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Лопухиной М. А., около 15 октября 1832 *
11. М. А. Лопухиной

<Петербург, около 15 октября 1832 г.>

Je suis extrêmement fâché que ma lettre pour ma cousine soit perdue ainsi que la vôtre pour grand'maman; – ma cousine pense peut-être que j'ai fait le paresseux, ou que je mens en disant que j'ai écrit; mais ni l'un ni l'autre ne serait juste de sa part; puisque je l'aime beaucoup, trop pour m'esquiver par un mensonge, et que, à ce que vous pouvez lui attester, je ne suis pas paresseux à écrire; je me justifierai peut-être avec ce même courrier, et si non, je vous prie de le faire pour moi; après-demain je tiens examen, et suis enterré dans les mathématiques. – Dites lui de m'écrire quelquefois; ses lettres sont si aimables.

Je ne puis pas m'imaginer encore, quel effet produira sur vous ma grande nouvelle; moi, qui jusqu'à présent avais vécu pour la carrière littéraire, après avoir tant sacrifié pour mon ingrat idole, voilà que je me fais guerrier; – peut-être est-ce le vouloir particulier de la providence! – peut-être ce chemin est-il le plus court; et s'il ne me mène pas à mon premier but, peut-être me ménerat-il au dernier de tout le monde. Mourir une balle de plomb dans le cœur, vaut bien une lente agonie de vieillard; – aussi, s'il y a la guerre, je vous jure par dieu d'être le premier partout. – Dites je vous en prie, à Alexis * que je lui enverrai un cadeau dont il ne se doute pas; il avait il y a longtemps désiré quelque chose de semblable; et je lui envoie la même chose, seulement dix fois mieux; – maintenant je ne lui écris pas, car je n'ai pas le temps; dans quelques jours l'examen; une fois entré je vous assomme de lettres, et je vous conjure tous, et toutes, de me riposter; – mademoiselle Sophie * m'a promis de m'écrire aussitôt après son arrivée; le saintdu Voronège lui aurait-il conseillé de m'oublier? * – dites lui que je voudrais savoir de ses nouvelles, – Que coûte une lettre? – une demi-heure! et elle n'entre pas à l'école des guardes; – vraiment je n'ai que la nuit; – vous, c'est autre chose; il me parait que, si je ne vous communique pas quelque chose d'important, arrivé à ma personne, je suis privé de la moitié de ma résolution. – Croyez ou non, mais cela est tout-à-fait vrai; je ne sais pourquoi, mais lorsque je reçois une lettre de vous, je ne puis m'empêcher de répondre tout de suite, comme si je vous parlais.

Adieu donc, chère amie; je ne dis pas au revoir, puisque je ne puis espérer de vous voir ici, et entre moi et la chère Moscou il y a des barrières insurmontables, que le sort semble vouloir augmenter de jour en jour. – Adieu, ne soyez pas plus paresseuse que vous n'avez été jusqu'ici, et je serai content de vous; maintenant j'aurai besoin de vos lettres plus que jamais: enfermé comme serai, cela sera ma plus grande jouissance; cela seul pourra relier mon passé avec mon avenir, qui déjà s'en vont chacun de son côté, en laissant entre eux une barrière de 2 tristes, pénibles années * ; prenez sur vous cette tâche ennuyeuse, mais charitable, et vous empècherez une vie de se démolir; – à vous seule je puis dire tout ce que je pense, bien ou mal, ce que j'ai déjà prouvé par ma confession; et vous ne devez pas rester en arrière; vous ne devez pas – car ce n'est pas une complaisance que je vous demande, mais un bienfait. – J'ai été inquiet il y a quelques jours, maintenant je ne le suis plus: tout est fini; j'ai vécu, j'ai mûri trop tôt; et les jours que vont suivre seront vides de sensations…

 
Он был рожден для счастья, для надежд *
И вдохновений мирных! – но безумный
Из детских рано вырвался одежд
И сердце бросил в море жизни шумной;
И мир не пощадил – и бог не спас! —
Так сочный плод до времени созрелый
Между цветов висит осиротелый;
Ни вкуса он не радует, ни глаз;
И час их красоты – его паденья час! —
И жадный червь его грызет, грызет,
И между тем как нежные подруги
Колеблются на ветках – ранний плод
Лишь тяготит свою… до первой вьюги!
– Ужасно стариком быть без седин; —
Он равных не находит; за толпою
Идет, хоть с ней не делится душою; —
Он меж людьми ни раб, ни властелин,
И всё, что чувствует, он чувствует один!
 

Adieu – mes poclony * à tous – adieu, ne m'oubliez pas.

M. Lermantoff.

P. S. Je n'ai jamais rien écrit par rapport à vous à Evreïnoff * ; et vous voyez que tout ce que j'ai dit de son caractère, est vrai; seulement j'ai eu tort en disant qu'il était hypocrite [81]81
  было:qu'il est hypocrite – Ред.


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– il n'a pas assez de moyens pour cela; il n'est que menteur.

<См. перевод в примечаниях * >

Верещагиной А. М., октябрь – ноябрь 1832 *

<Петербург, конец октября, начало ноября 1832 г.>

Femme injuste et crédule! (et remarquez que j'ai le plein droit de vous nommer ainsi, chère cousine). Vous avez crû aux paroles et à la lettre d'une jeune fille sans les analyser; Annette * dit qu'elle n'a jamais écrit que j'avais une histoire * , mais qu'on ne m'a pas compté les années que j'ai passées à Moscou, comme à tant d'autres; car il y a une réforme dans toutes les universités * , et je crains qu'Alexis * n'en souffre aussi, puisqu'on ajoute une année aux trois insupportables.

– Vous devez déjà savoir, notre dame, que j'entre à l'école des guardes; ce qui me privera malheureusement du plaisir de vous voir bientôt. – Si vous pouviez déviner tout le chagrin que cela me fait, vous m'auriez plaint; – ne grondez donc plus, et consolez moi, si vous avez un cœur. —

Je ne puis concevoir ce que vous voulez dire par peserles paroles,je ne me rappelle pas vous avoir écrit quelque chose de semblable. Au surplus je vous remercie de m'avoir grondé, cela me servira pour l'avenir; et si vous venez à Pétersbourg j'espère me venger entièrement, – et par-dessus le marché – à coups de sabre – et point de quartier, entendez vous! – mais que cela ne vous effraye pas; venez toujours, et amenez avec vous une suite nombreuse; et mademoiselle Sophie * , à laquelle je n'écris pas, parce que je boude contre elle; elle m'a promis de m'écrire en arrivant de Voronège – une longue lettre,et je ne m'aperçois que de la longueur du temps – qui remplace la lettre.

– Et vous, chère cousine, vous m'accusez de la même chose! – et pourtant je vous ai écrit deux lettres après monsieur Paul Evreïnoff * . Mais comme elles étaient adressées dans la maison Stolypine à Moscou * , je suis sûr que le Léthé les a englouties, ou que la femme d'un domestique entortilla des chandelles avec mes tendres épîtres.

– Donc, je vous attends cet hiver; point de réponses évasives; vous devez venir; un beau projet ne doit pas être ainsi abandonné, la fleur ne doit pas se faner sur sa tige, et cetera.

En attendant je vous dis adieu, car je n'ai plus rien à vous communiquer d'intéressant; je me prépare pour l'examen, et dans une semaine, avec l'aide de dieu, je serai militaire; encore: vous attribuez trop à l'eau de la Néva; elle est un très bon purgatif, mais je ne lui connais point d'autre qualité; apparemment que vous avez oublié mes galanteries passées, et que vous n'êtes que pour le présent et le futur, * qui ne manquera pas de se présenter à vous par la première occasion; adieu donc, chère amie, et mettez tous vos soins à me trouver une future;il faut qu'elle ressemble à Dachinka * , mais qu'elle n'aie pas comme elle un gros ventre, car il n'y aurait plus de symétrie avec moi, comme vous savez; ou comme vous ne savez pas, car je suis devenu fin comme une allumette.

Je baise vos mains

M. Lerma.

P. S. Mes compliments aux tantes. —

<См. перевод в примечаниях * >

Лопухиной М. А., 19 июня 1833 *

19 Juin, Pétersbourg <1833 г.>

J'ai reçu vos deux lettres hier, chère amie, et je les ai – dévorées; il y a si longtemps que je n'ai eu de vos nouvelles; hier c'est le dernier dimanche que j'ai passé en ville, car demain (mardi) nous allons au camp pour deux mois; – je vous écris assis sur un banc de l'école au milieu du bruit des préparatifs, etc… – Vous serez, à ce que je crois, contente d'apprendre, que, n'ayant passé à l'école que deux mois, j'ai subi mon examen, pour la I-re classe, et suis, un des premiers… cela nourrit toujours l'espérance d'une prochaine liberté! —

Il faut pourtant absolument que je vous raconte une chose assez étrange; samedi avant de me réveiller je vois en songe, que je suis dans votre maison; vous êtes assise sur le grand canapé du salon; je m'approche de vous pour vous demander, si vous voulez définitivement que je me brouille avec vous – mais vous sans répondre m'avez tendu la main; le soir on nous laisse partir; j'arrive chez nous – et je trouve vos lettres. Cela me frappe! – je voudrais savoir: que faisiez vous ce jour-là? —

Maintenant il faut que je vous explique pourquoi j'adresse cette lettre à Moscou et non à la campagne; j'ai laissé votre lettre à la maison et l'adresse avec; et comme personne ne sait où je conserve vos lettres, je ne puis la faire venir ici.

Vous me demandez ce que signifie la phrase à propos du mariage du prince * : удавится или женится! – ma parole d'honneur que je ne me rappele pas avoir écrit quelque chose de semblable. Car j'ai trop bonne opinion du prince et je suis sûr qu'il n'est pas un de ceux qui choisissent, les promises d'après un registre;

– Dites je vous prie à ma cousine * que l'hiver prochain elle aura un cavalier aimable et beau: Jean Vatkofsky * est officier des gardes; et tout cela parce que son colonel se marie avec sa sœur * ! – et dites après qu'il n'y a pas de hasard dans ce bas monde.

Dites moi à cœur ouvert: vous m'avez boudé pendant quelque temps? – et bien puisque c'est fini n'en parlons plus – adieu, on me demande – car le général est arrivé. – Adieu.

M. Lerma.

Mes compliments à tout le monde.

Il fait tard; j'ai trouvé un moment de loisir pour continuer cette lettre. Il y a tant de choses qui se sont passées en moi depuis que je ne vous ai écrit, tant de choses étranges, que je ne sais moi-même, quelle route je vais prendre: celle du vice ou de la sottise; il est vrai que toutes les deux mènent souvent au même but; – je sais que vous m'exhorterez, que vous essayerez de me consoler – ce serait de trop! je suis plus heureux que jamais, plus gai que le premier ivrogne chantant dans la rue! – Les termes vous déplaisent – mais hélas: dis moi qui tu hantes je te dirai qui tu es!– Je vous crois que mademoiselle S. * est fausse, car je sais que vous ne direz jamais de fausseté d'autant plus si c'est du mal! – que dieu la bénisse! – quant aux autres choses que j'aurais pu vous écrire. – Je guarde le silence, pensant que beaucoup de paroles ne valent pas une action, et comme je suis paresseux de nature, ainsi [82]82
  было:comme – Ред.


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que vous le savez, chère amie, je m'endors sur mes lauriers, mettant une fin tragique à mes actions et paroles à la fois

– adieu.

<См. перевод в примечаниях * >

Лопухиной М. А., 4 августа 1833 *

S.-Pétersbourg. Le 4-me Août.<1833 г.>

Je ne vous ai pas donné de mes nouvelles depuis que nous sommes allés au camp; et vraiment je n'aurais pu y réussir avec toute la bonne volonté possible; imaginez-vous une tente qui a 3 archines en long et en large et 2 1/2 de hauteur, occupée par trois personnes et tout leur bagage, toute leur armure, comme: sabres, carabines, chakos [83]83
  в рукописи:chacauts – Ред.


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etc., etc. – le temps a été horrible, une pluie qui ne finissait pas faisait, que souvent nous passions 2 jours de suite sans pouvoir sécher nos habits; et pourtant cette vie ne m'a pas tout-à-fait déplu; vous savez, chère amie, que j'eus toujours un penchant très prononcé pour la pluie et la boue, et maintenant grâce à dieu j'en ai joui complètement.

– Nous sommes rentrés en ville, et bientôt recommencent nos occupations; la seule chose qui me soutient, c'est l'idée que dans un an je suis officier. – Et alors, alors —… bon dieu! si vous saviez la vie que je me propose de mener !..oh, cela sera charmant: d'abord, des bizarreries, des folies de toute espèce, et de la poésie noyée dans du champagne: – je sais vous allez vous recrier; mais hélas, le temps de mes rêves est passé; le temps de croire n'est plus; il me faut des plaisirs matériels, un bonheur palpable, un bonheur qui s'achète avec de l'or, que l'on porte dans sa poche comme une tabatière, un bonheur qui ne fasse que tromper mes sens en laissant mon âme tranquille et inactive !..voilà ce qui m'est nécessaire maintenant, et vous vous apercevez, chère amie, que je suis quelque peu changé depuis que nous sommes séparés; quand j'ai vu mes beaux rêves s'enfuir, je me suis dit que ça ne valait pas la peine d'en fabriquer d'autres; il vaut mieux, pensai-je, apprendre à s'en passer; j'essayai; j'avais l'air d'un ivrogne qui peu à peu tâche de se déshabituer du vin; – mes efforts ne furent pas inutiles, et bientôt je ne vis dans le passé qu'un programme d'aventures insignifiantes et fort communes. Mais parlons d'autres choses; – vous me dites que le Prince T. et votre sœur son épouse * se trouvent fort contents l'un de l'autre; je n'y ajoute pas une foi entière, car je crois connaître le caractère de tous les deux, et votre sœur ne paraît pas très disposée à la soumission, et il paraît que monsieur n'est pas non plus un agneau! – Je souhaite que ce calme factice dure le plus longtemps possible – mais je ne saurai prédire rien de bon. – Ce n'est pas que je vous trouve un manque de pénétration; mais je crois plutôt, que vous n'avez pas voulu me dire tout ce que vous pensiez; et c'est très naturel; car maintenant si mes suppositions sont vraies, vous n'avez pas même besoin de dire: oui. – Que faites vous à la campagne? vos voisins sont-ils amusants, aimables, nombreux? voici des questions qui vous auront l'air d'être faites sans aucune intention sérieuse!

Dans un an, peut-être, je viendrai vous voir; et quels changements ne trouverai-je pas? – me reconnaîtrez-vous, et voudrez-vous le faire? – Et moi, quel rôle jouerai-je? sera-ce un moment de plaisir, pour vous, ou d'embarras pour nous deux? car je vous avertis, que je ne suis plus le même * , que je ne sens plus, que je ne parle plus de la même manière, et dieu sait ce que je deviendrai encore dans un an; – ma vie jusqu'ici n'a été qu'une suite de désappointements, qui me font rire maintenant, rire de moi et des autres; je n'ai fait qu'effleurer tous les plaisirs, et sans en avoir joui, j'en suis dégoûté.

– Mais ceci est un sujet bien triste que je tâcherai de ne pas ramener une autre fois; lorsque vous serez à Moscou annoncez le moi, chère amie… – je compte sur votre constance; adieu;

M. Ler…

P. S. Mes compliments à ma cousine * , si vous lui écrivez, car je suis trop paresseux pour le faire moi-même.

<См. перевод в примечаниях * >

Симанской М. Л., 20 февраля 1834 *

<Петербург, 20 февраля 1834 r.>

Ma chère cousine! Je me rends avec extaseà votre aimable invitation, et certainement je ne manquerai pas de venir féliciter mon oncle d'abord après diner, car – pour mon grand désespoir mon cousin Stolipine est mort avant hier, – et je suis sûr que vous ne trouverez pas mal que je me prive du plaisir de vous voir quelques heures plus tôt, pour aller, remplir un devoir aussi triste qu'indispensable. – À vous pour toute la soirée et toute la vie.

M. L.

<См. перевод в примечаниях * >

Лопухиной М. А., 23 декабря 1834 *

S.-Pétersbourg. Le 23 décembre <1834 г.>

Chère amie! – quoi qu'il arrive je ne vous nommerai jamais autrement, car ce serait briser le dernier lien qui m'attache encore au passé – et je ne le voudrais pour rien au monde; car mon avenir quoique brillant à l'oeil, est vide et plat; je dois vous avouer que chaque jour je m'aperçois de plus en plus que je ne serai jamais bon à rien, avec tous mes beaux rêves, et mes mauvais essais dans le chemin de la vie… car: ou l'occasion me manque ou l'audace!… on me dit: l'occasion arrivera un jour! l'expérience et le temps vous donneront de l'audace !..et qui sait, quand tout cela viendra, s'il me restera alors quelque chose de cette âme brûlante et jeune, que dieu m'a donnée fort mal à propos? si ma volonté ne sera pas épuisée à force de patienter ?…si enfin je ne serai pas tout-à-fait désabusé de tout ce qui nous force d'avancer dans l'existence ?..

Je commence ainsi ma lettre par une confession,vraiment sans y penser! – Eh bien, qu'elle me serve d'excuse: vous verrez là du moins que si mon caractère est un peu changé, mon cœur ne l'est pas. La vue seule de votre dernière lettre a déjà été pour moi un reproche – bien mérité certainement; mais que pouvais-je vous écrire? – vous parler de moi? – vraiment je suis tellement blasé sur ma personne, [84]84
  передpersonne было:propre – Ред.


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que lorsque je me surprends à admirer ma propre pensée, je cherche à me rappeler: où je l'ai lue !..et par suite de cela j'en suis venu à ne pas lire, pour ne pas penser !..je vais dans le monde maintenant… pour me faire connaître, pour prouver que je suis capable de trouver du plaisir dans la bonne société; – ah!! !..Je fais la cour, et à la suite d'une déclaration je dis des impertinences: ça m'amuse encore un peu; et quoique cela ne soit pas tout-à-fait nouveau, du moins cela se voit rarement !..vous supposerez qu'on me renvoie après cela tout de bon… eh bien non, tout au contraire…. les femmes sont ainsi faites; je commence à avoir de l'aplomb avec elles! rien ne me trouble, ni colère, ni tendresse: je suis toujours empressé et bouillant, avec un cœur assez froid, qui ne bat que dans les grandes occasions: n'est-ce pas, j'ai fait du chemin !..et ne croyez pas que ce soit une fanfaronnade: je le suis maintenant l'homme le plus modeste – et puis je sais bien que ça ne me donnera pas une couleur favorable à vos yeux; mais je dis, parce que ce n'est qu'avec vous que j'ose être sincère, ce n'est que vous qui saurez me plaindre sans m'humilier, puisque je m'humilie déjà moi-même; si je ne connaissais votre générosité et votre bon sens je n'aurais pas dit ce que j'ai dit; et peut-être, puisque autrefois vous avez calmé un chagrin bien vif, peut-être, voudrez-vous maintenant chasser par de douces paroles cette froide ironie qui se glisse dans mon âme irrésistiblement, comme l'eau qui entre dans un bateau brisé. Oh! combien j'aurais voulu vous revoir, vous parler: car c'est l'accent de vos paroles, qui me faisait du bien; vraiment on devrait en écrivant mettre des notes au-dessus des mots; – car maintenant lire une lettre, c'est comme regarder un portrait: point de vie, point de mouvement; l'expression d'une pensée immuable, quelque chose qui sent la mort !..

– J'etais à Царское Село * lorsque Alexis * est arrivé; quand j'en ai reçu la nouvelle, je suis devenu presque fou de joie; je me suis surpris discourant avec moi-même, riant, me serrant les mains l'une l'autre; je suis retourné en un moment à mes joies passées, j'ai sauté deux années terribles, enfin *

Je l'ai trouvé bien changé, votre frère, il est gros, comme J'étais alors, il est rose, – mais toujours sérieux, pause; pourtant nous avons ri comme des fous la soirée de notre entrevue, – et dieu sait de quoi?

Dites moi, j'ai cru remarquer qu'il a du tendre pour m-lle Cathérine Souchkoff * …est-ce que vous le savez? – les oncles de mamselle auraient bien voulu les marier !..Dieu préserve !..cette femme est une chauve souris, dont les ailes s'accrochent à tout ce qu'ils rencontrent! – il y eut un temps où elle me plaisait, maintenant elle me force presque de lui faire la cour… mais, je ne sais, il y a quelque chose, dans ses manières, dans sa voix, quelque chose de dur, de saccadé, de brisé, qui repousse; tout en cherchant à lui plaire on trouve du plaisir à la compromettre, de la voir s'embarrasser dans ses propres filets.

Ecrivez-moi de grâce, chère amie, maintenant que tous nos différens sont réglés, que vous n'avez plus à vous plaindre de moi, car je pense avoir été assez sincère, assez soumis dans cette lettre pour vous faire oublier mon crime de lèse-amitié !..

Je voudrais bien vous revoir encore:. au fond de ce désir, pardonnez, il gît une pensée égoïste, c'est que, près de vous, je me retrouverais moi-même, tel que j'étais autrefois, confiant, riche d'amour et de dévouement, riche enfin de tous les biens que les hommes ne peuvent nous ôter, et que dieu m'a ôté. lui! – Adieu, adieu – je voudrais continuer mais je ne puis.

M. Lerma.

– P. S. Mes compliments à tous ceux auxquels vous jugerez convenable de les faire pour moi… adieu encore.

<См. перевод в примечаниях * >


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